Star Trek Voyager
La saison 8 virtuelle
8.18 Piège mental
Dernière mise à jour :07 mai 2002
Retour a la page d'accueil
Retour à la page d'accueil

.. 8.18 couverture 'PIEGE MENTAL'
Retour aux autres épisodes de la saison 8
 
8.18 PIEGE MENTAL
Episode précédent    Version Texte    Version originale    Episode suivant
.. Episode 8.18 - PIEGE MENTAL
Par: Bec & Rebel (CoffeeNut47@aol.com)
Version française: Delphine (delph.cass@voila.fr)

Note: Star Trek: Voyager, personnages et autres produits dérivés sont des marques déposées de Paramount Pictures. Aucune infraction aux droits d'auteurs de Paramount voulue. La Saison 8 virtuelle de Voyager (Voyager Virtual Season 8, VS8) est une entreprise à but non lucrative. L'histoire est propriété de son auteur. Pas de reproduction sans sa permission.

"Chakotay et B'Elanna sont à un tournant de leur vie tandis que le comportement de Seven devient de plus en plus dérangé."
 
Seven of Nine observait le mur en face d'elle. Son regard semblait pratiquement percer le mur métallique peu épais qui séparait les pièces, ses yeux ne déviant jamais d'un point fixe. Ses battements de paupières semblaient presque mécaniques, à espaces réguliers.
Derrière le mur, observant l'ancien Borg, le lieutenant Jordan frissonnait, faisant pivoter sa chaise pour faire face à sa collègue, occupée à taper sur sa console, profondément absorbée par son travail. Derrière Jordan, à travers la glace sans teint qui apparaissait comme un miroir pour la femme dans la pièce sécurisée, Seven of Nine continuait à regarder directement devant elle, ne montrant aucun changement dans son expression ou sa posture.
Posant doucement sa tasse sur son ventre trahissant sa grossesse, et jetant un regard par-dessus son épaule au Borg au regard transperçant, Lucy commenta calmement: "c'est presque comme si elle pouvait nous voir."
Yvette arrêta ses recherches quelques instants pour regarder son amie. "C'est fou, Lucy. Il n'y a aucun moyen pour qu'elle puisse nous voir à travers la vitre. C'est juste..." Elle leva son regard vers la Borg assise sur le lit médical "... Une coïncidence" finit-elle doucement, semblant plus incertaine.
"Oui", soupira Lucy. Elle observa à nouveau Seven of Nine, qui regardait toujours en face d'elle, ses incroyables yeux bleus fixés sur un certain point. La pensée que la Borg était en train de les observer était plus qu'elle ne pouvait supporter. Bien qu'elle et le reste de l'équipe de surveillance qui travaillaient aux affaires de sécurité concernant Seven of Nine avaient été assurés pendant le briefing qu'elle était maintenant inoffensive, Lucy ne parvenait pas à contrôler le frisson qui descendait le long de sa colonne à chaque fois qu'elle regardait l'ancienne Borg. Ils avaient été ennemis avec la race des borgs pendant si longtemps qu'il lui semblait maintenant étrange de protéger et de garder un membre de leur race.
"Je comprends..." disait Seven d'une voix étouffée mais amplifiée, dans la pièce d'observation. "Oui, oui... Je suis d'accord..." Soudain, elle fut à nouveau silencieuse, comme si elle écoutait quelque chose.
"Dans combien de temps, son compte-rendu de mission, déjà ?" demanda Yvette distraitement.
"Ce doit être demain ou après-demain" dit Lucy, se mordillant les lèvres pensivement. "Je n'en suis pas complètement sûre, tu devras vérifier sur son dossier. Pour quelle raison ?"
"Oh, aucune raison particulière", la rassura Yvette. "Je me demandais juste... Entre nous, le plus tôt nous aurons fini avec elle, le mieux ce sera. Elle me donne la chair de poule..."
"Non !" Le cri de Seven résonna à travers la pièce, faisant sursauter les deux femmes. "Inacceptable !"
Lucy soupira. "Moi aussi, le plus tôt sera le mieux."
 
*****
 
Catherine Janeway était fatiguée, infiniment fatiguée.
Elle repoussa la tablette qu'elle essayait de lire pour la quatrième fois en une heure. Elle se leva de sa chaise et alla jusqu'au réplicateur. "Café, noir."
La tasse se matérialisa dans un vrombissement et un halo bleu, puis elle la prit. Elle la tint délicatement entre ses mains en allant lentement jusqu'à la fenêtre, où elle regarda la myriade d'officiers de Starfleet se précipiter dans une étrange course. Même cela paraissait être plus intéressant que son travail. Elle et le travail de bureau n'allaient pas ensemble... et n'iraient jamais ensemble.
Le travail de bureau. Ces mots sonnaient comme un désastre à ses oreilles. Elle préférait de loin la vie active, celle d'un Capitaine d'un vaisseau, à la monotonie ennuyeuse d'être assis à une table, à lire et relire des rapports. Le frisson de l'exploration, de la découverte et des défis devant la nouveauté et l'inconnu l'avait toujours intriguée, et elle avait espéré continuer de faire cela pour le restant de sa vie. C'était la raison pour laquelle elle avait rejoint Starfleet en premier lieu.
Et elle était là, coincée avec les rapports, son pire cauchemar. Il y avait une raison pour qu'elle ait laissé Chakotay s'en occuper quand ils étaient à bord du Voyager.
Le Voyager.
Ses pensées voyageaient à leur convenance vers son ancien vaisseau et son ancien équipage, à tout le temps qu'ils avaient passé à se frayer un chemin à travers le quadrant Delta. Comme d'habitude, elle commençait à se demander si elle était désolée que les choses aient tourné ainsi, de s'être retrouvés coincés dans le quadrant Delta pendant sept ans, essayant futilement de trouver leur chemin vers leur maison. Elle avait pensé de nombreuses fois à cette grave question pendant leur exil involontaire et inévitablement, la réponse avait été non à chaque fois. Le temps qu'ils avaient passé ensemble les avait rapproché comme un groupe, d'une façon sans précédent, et l'équipage du Voyager était devenu plus que ça, plus que son équipage. Ils étaient devenus sa famille. Elle savait qu'elle aurait fait les mêmes choix si elle avait connu le destin du Voyager quand elle en avait pris le commandement.
Elle se remémorait toujours ce jour. Elle avait été si heureuse, si excitée que le dernier-né des vaisseaux de Starfleet soit le sien, sous son commandement. Excitée par la perspective de faire des choses jamais tentées auparavant, de pousser cette nouvelle technologie à ses limites. C'est exactement ce qu'elle avait fait, et cela lui avait procuré beaucoup de plaisir. Oui, elle avait pris des décisions critiquables, mais elle avait toujours essayé de les laisser derrière elle et résolu de ne pas refaire les mêmes erreurs. Cela avait été dur, mais elle vivait pour les défis, et le temps qu'elle avait passé de l'autre côté de la galaxie avait été épanouissant comme rien auparavant ne l'avait jamais été. Elle avait changé, mûri, elle avait vécu les meilleurs moments qu'elle ait jamais connus, et elle n'aurait abandonné cela pour rien au monde.
Elle aurait aimé se retrouver à bord du Voyager.
Son esprit retourna dans le présent tout d'un coup, et elle sentit son cÏur commencer à se serrer. Ces sept années avaient été les meilleures de sa vie, mais maintenant la technologie du Voyager n'était plus à la pointe, et elle était piégée dans un bureau. Trois jours, et elle sentait déjà la pression de son ennuyeux travail de bureau.
Elle soupira, prit une grande gorgée de son café et se massa doucement les tempes. Tous ces textes de formulaires répétitifs avaient commencé à lui donner mal au crâne. Elle avait très envie d'être sur la passerelle d'un vaisseau, de le commander vers des endroits encore inconnus.
Un jour, elle espérait qu'elle aurait la chance de le refaire encore une fois. Jusqu'à ce que cela arrive, elle devait simplement s'accommoder de son nouveau poste.
Mais au fond d'elle même, elle se demandait si elle y arriverait jamais.
 
*****
 
Contrairement aux autres membres d'équipage qui étaient consignés et attendaient de faire leur compte rendu de mission, Seven n'avait personnalisé sa chambre d'aucune façon. Pas d'objets personnels, pas de photos, pas de tablettes de données, rien pour se divertir. Rien que des objets de première nécessité comme des vêtements, et encore étaient-ils soigneusement rangés dans la penderie. La pièce apparaissait comme d'origine, aussi impeccable qu'elle l'était quand elle y avait été assignée.
Les portes de sa cellule s'ouvrirent dans un bruit de frottement et un officier de la sécurité blonde entra, souriant avec enthousiasme.
"Seven of Nine ?" demanda-t-elle bien que la question n'était que rhétorique. On ne pouvait confondre l'ancienne Borg avec personne, et elle était déjà l'objet de nombreuses curiosités et spéculations. Toute l'équipe de commandement du Voyager était très connue à travers l'ensemble de la Fédération pour leur voyage de retour sur Terre déjà presque légendaire, mais Seven avait eu encore plus de publicité que tous les autres exceptée Catherine Janeway, parce qu'elle était à moitié Borg.
"Je suis le Lieutenant Hawkins", continua l'officier de sécurité en se présentant. "Je suis là pour vous accompagner à votre compte-rendu, si vous êtes prête."
Seven se leva de son lit. "Je suis... préparée", déclara t-elle, s'approchant du Lieutenant.
"Et bien, allons-y", dit la jeune femme joyeusement, la conduisant hors de la pièce. Dans le couloir, deux gardes armés attendaient les sorties des deux femmes. En silence, ils commencèrent leur chemin à travers le Quartier Général de Starfleet en direction des salles de compte-rendu. Les couloirs étaient calmes, il n'y avait pas d'agitation, comme Seven s'était imaginé les lieux.
Seven était consciente des regards qui se tournaient vers elle à son passage. Elle supposait qu'il en avait été de même pour le reste de l'équipage, d'être reconnu immédiatement, et elle se demandait combien de temps cela allait durer. Elle n'aimait pas l'attention qu'on lui portait du fait qu'elle soit à moitié Borg, et si cette attention augmentait comme il le semblait, elle ne savait pas si elle pourrait vraiment s'y adapter.
"Et nous y sommes", annonça la femme sur un ton plaisant, en désignant la porte sur leur gauche, prêt à s'arrêter.
Les portes s'ouvrirent, révélant une large pièce, les rayons du soleil filtrant à travers les fenêtres, diffusant une lumière chaude dans la pièce. Une longue table trônait au milieu de la pièce, entourée de fauteuils où étaient assis de nombreux Amiraux. Des peintures accrochées au mur étaient les uniques décorations, quelques plantes étaient disposées le long des murs et dans un coin, il y avait un aquarium de poissons lions.
Les conversations s'étaient tues à son entrée, et Seven trouvait le silence plutôt gênant.
"Je vous en prie, asseyez-vous", dit Hayes rapidement. Pendant que Seven s'asseyait, il commença. "Voudriez-vous s'il vous plaît commencer par décliner votre nom et votre ancienne désignation pour l'enregistrement officiel."
"Seven of Nine" répondit Seven, "Anciennement assistant tertiaire de la matrice 01."
Comme elle avait fini, Hayes prit une tablette de données afin de commencer l'interrogatoire. "A quelle date avez-vous rejoint l'équipage du Voyager pour la première fois ?"
"Date stellaire 51003.7" dit Seven promptement.
"Quelle a été votre première impression à bord du Voyager ?
"Je n'aimais pas être forcée de rester à bord" répondit Seven. "Je ne souhaitais pas devenir un individu. Je souhaitais rejoindre le Collectif. Je n'étais pas sûre de survivre sans l'esprit de la ruche."
"Niez-vous avoir tenté de contacter les Borgs." demanda Hayes en la fixant d'un regard de glace.
"Non", dit Seven, nullement intimidée par ce regard hargneux. "J'ai relaté mes tentatives pour joindre le Collectif dans mon journal de bord, que vous avez examiné, je crois."
Hayes la regarda, "Pourquoi souhaitiez-vous contacter les Borgs ?"
"Je souhaitais rejoindre le Collectif"
"Pourquoi ?"
"Ils étaient tout ce que j'avais toujours connu", dit Seven, son esprit tentant rapidement de trouver une explication que Hayes puisse comprendre. "Pour moi, les Borgs étaient l'équivalent de ma famille."
"Et quand vous vous êtes adaptée à votre individualité, souhaitiez-vous toujours rejoindre le Collectif. ?" demanda Hayes.
Seven réfléchit un instant, se demandant combien cela pouvait être significatif. "Non, je ne le souhaitais plus."
"Pourquoi ?"
"Je ne vois pas en quoi cela peut être utile", protesta Seven d'une voix trahissant son embarras.
"Répondez à la question ?" insista sèchement Hayes
Seven le regarda avec une pointe d'exaspération, puis continua. "J'ai découvert qu'il y avait peut-être plus à gagner dans l'humanité en étant un individu que je ne l'avais présumé. Même si je trouvais le silence dans mon esprit dérangeant, je me suis adaptée."
"Avez-vous tenté de contacter les Borgs après cela ?" l'interrogea Hayes, se penchant légèrement en avant en attendant avec impatience sa réponse.
"Non" répondit elle, "Je ne l'ai pas tenté"
"Pas une seule fois. ?"
"Non" répondit fermement Seven
Hayes se releva. On pouvait voir la déception sur son visage. "Et bien, continuons." Il regarda la tablette de données qu'il tenait dans ses mains. "Quelle a été votre première impression, quand vous avez rencontré Catherine Janeway, la première fois ?"
"Je l'ai trouvée... obstinée", commença Seven. "Tout d'abord, je..." Elle se tut, regardant soudain dans le vide. Elle croisa le regard d'Hayes, mais ne dit rien.
"Oui... ?" l'incita Hayes, impatiemment
Seven le regarda, légèrement perplexe. "Je suis désolée... ?"
Hayes secoua la tête, lançant un regard méchant à Seven. "Refus de répondre aux questions... Non coopérative", dit-il à voix haute tout en tapant sur sa tablette.
"Que faites-vous..." commença Seven sans pouvoir en dire plus.
"Continuons, voulez-vous ?" la coupa Hayes, en regardant Seven. "Vous sentez-vous responsable des autres implications du Voyager avec les Borgs ?"
Seven le regarda, déroutée, puis reporta son regard dans le vide, murmurant "Je suis d'accord... Vous avez raison, comme toujours..."
Quelques-uns des Amiraux assis autour de la table échangèrent des regards inquiets puis regardèrent Hayes avec un hochement de tête. Hayes semblait pris au dépourvu par ce soudain changement de comportement.
"Je répète, vous sentez-vous responsable des autres implications du Voyager avec les Borgs ?"
"Ce n'est pas important", murmura Seven, regardant d'abord Hayes puis les autres Amiraux autour de la table.
"Nouvelle preuve de manque de coopération", nota Hayes, lançant un regard furieux à Seven et notant plus de détails sur sa tablette.
"Je crois, oui", dit calmement Seven, regardant le plafond puis laissant son regard errer autour de la pièce comme si elle la découvrait pour la première fois.
Les différents Amiraux se regardèrent à nouveau, inquiets, et Hayes demanda à la femme aux cheveux gris qui était assise à côté de lui. "Est-ce qu'elle me répondait ?"
"Je crois qu'elle pense tout haut", répondit la femme sans quitter des yeux l'ancienne Borg.
"Absolument inacceptable !" Le visage de Seven avait soudain changé d'expression. Elle semblait déterminée et en colère, furieuse en fait, et lançait des regards haineux devant elle, un regard de glace sur le mur. "L'échec est inacceptable, je vous l'avais déjà dit !"
"Devons-nous contacter un médecin de Starfleet ?" demanda l'un des Amiraux inquiets dans un chuchotement.
Hayes hocha la tête en signe de confirmation. "Contactez le département médical de Starfleet, faites-leur savoir ce qui se passe et amenez une garde de la sécurité pour l'escorter."
"Peut-être devrions-nous contacter leur Docteur..." suggéra un autre Amiral. "Pour voir si c'est déjà arrivé avant..."
"Excellente idée", le félicita Hayes, sans quitter l'ancienne Borg des yeux une seule seconde.
 
******
 
Toutes les conversations cessèrent quand les portes métalliques s'ouvrirent, et trois paires d'yeux fixèrent les deux officiers de la sécurité de Starfleet dans leur uniforme or et noir qui se tenaient dans l'embrasure de la porte. L'un tenait un long phaseur à compression automatique, menaçant B'Elanna inutilement. Depuis qu'ils avaient libéré Tom, elle ne ferait rien qui risquerait de compromettre cette situation.
"Thomas Eugène Paris ?" demanda officiellement l'un des gardes, regardant directement Tom en lui posant la question. Il semblait impressionné par l'ancien membre du Maquis et n'osait entrer dans la pièce.
"Je pense que c'est pour moi", dit Tom en se levant doucement. Il avait passé toute la matinée à redouter cet instant. En se levant, il se tourna immédiatement vers B'Elanna. "Est-ce que ça va aller?" lui demanda-t-il gentiment.
"Ca va aller", répondit honnêtement B'Elanna en se levant à son tour. Elle l'embrassa gentiment sur les lèvres, passant ses bras autour de son cou. "Embrasse Miral pour moi", dit-elle en souriant, sentant un pincement au cÏur en pensant à sa petite fille. La séparation était très difficile pour elle. Elle savait parfaitement que sa fille serait entre de bonnes mains, mais c'était quand même dur d'être éloignée de sa propre fille pour aussi longtemps.
"Je le ferai", dit Tom, lui retournant son sourire tandis qu'ils se séparaient. Il était difficile de garder ce masque heureux sur le départ alors que B'Elanna ne l'accompagnait pas, mais il tenait bon. Il avait offert de rester, mais B'Elanna avait rapidement refusé la suggestion, l'assurant qu'elle irait bien, et lui rappelant que Miral avait au moins besoin d'un de ses parents à ses cotés.
"Prenez soin de vous, Tom", dit Chakotay en lui donnant une claque dans le dos.
"Vous aussi", répondit Tom sincèrement, lui retournant sa claque avant de se retourner vers B'Elanna, et de l'embrasser encore une fois. "On se voit dans quelques jours si tout va bien."
B'Elanna l'enlaça et le serra contre elle. "Je t'aime", lui murmura-t-elle doucement.
"Je t'aime aussi", lui répondit Tom dans un sourire, tandis qu'ils se séparaient. Finalement, il attrapa le petit sac d'affaires qu'il avait préparé un peu plus tôt et posé près du lit. Sans effort, il le jeta sur son épaule. "A bientôt", promit-il encore, comme s'il voulait réaffirmer qu'il ne se passerait que quelques jours avant qu'ils soient réunis à nouveau."
Se dirigeant vers la porte, il se retourna une dernière fois "Au revoir", dit-il avant que les portes ne se referment derrière lui.
B'Elanna s'effondra dans le fauteuil, regardant la porte fermée après le départ de son mari, ultime barrière entre elle et sa liberté.
"Est-ce que tu vas bien ?" lui demanda Chakotay légèrement inquiet. Le visage de B'Elanna ne trahissait aucune émotion, mais il la connaissait trop pour penser qu'elle allait bien. B'Elanna affichait sa rage, mais c'était la seule émotion qu'elle ne parvenait pas à contrôler. Quand elle souffrait, il se fiait à son intuition ou à la confiance qu'elle plaçait en lui pour reconnaître ses vrais sentiments.
"Je vais bien", dit B'Elanna, sortant de sa torpeur pour regarder à nouveau Chakotay. Elle soupira "Je n'aime pas être séparée d'eux. Ils ont besoin de moi, Chakotay."
"Tu les verras bientôt", la rassura Chakotay.
"Je sais", dit B'Elanna, laissant ses lèvres se courber légèrement vers le haut, la trace d'un sourire à cette pensée. "Mais ça ne rend pas la chose plus facile, Chakotay. Je suis séparée de ma petite fille... Et maintenant de mon mari." Elle soupira doucement. "Les choses étaient si simples sur le Voyager."
"Je ne dirais pas cela", dit Chakotay, en désaccord. "Des races extraterrestres qui voulaient détruire le Voyager à chaque instant, la nécessité de rationner toute chose, les batailles perpétuelles, le voyage dans des territoires inconnus, l'ignorance de ce qui ou quoi nous attendrait le lendemain... Ce n'était vraiment pas une promenade de santé."
"C'est vrai", admit B'Elanna. "Mais il n'y avait pas ça", dit-elle en montrant la pièce. "Le confinement, les interrogatoires, être traités comme des criminels."
"Nous avions toujours su que cela arriverait un jour", lui dit-il sincèrement. "Quand nous avons rejoint le Maquis, nous savions que cela pouvait arriver, que cela arriverait. Seul le moment était inconnu."
"Les choses étaient différentes là-bas", dit B'Elanna, montrant et regardant à nouveau la porte métallique. "Je n'avais pas de famille, il n'y avait que moi. Si j'étais torturée ou tuée par les Cardassiens, ce n'était pas grave. Personne n'aurait été affecté par ma mort. Mais maintenant, je suis séparée de ma famille... J'ai des personnes qui comptent sur moi, des responsabilités. Et au lieu d'être où je devrais être, je suis coincée ici." Elle regarda autour d'elle, puis à nouveau Chakotay, prenant une profonde inspiration "C'est frustrant."
Après un moment de silence, Chakotay lui demanda, "le Maquis te manque quelques fois ?"
B'Elanna observa avec attention le sol, cherchant des yeux les joints entre les plaques. "Je ne sais pas", dit elle sincèrement. "Quelques fois... bien sûr. C'était une vie difficile, mais je l'aimais. J'ai combattu aux côtés de gens bien, et je croyais en cette cause."
"Mais...?" poursuivit Chakotay.
"Mais la plupart du temps, cette vie ne me manque pas", admit B'Elanna. "Maintenant, j'ai Tom et Miral. Je ne suis plus une mercenaire sans foyer, travaillant uniquement pour une cause. J'ai une famille qui dépend de moi. Je suis une épouse et une mère. C'est une vie bien plus épanouissante que de servir le Maquis."
"Je peux le comprendre", dit Chakotay honnêtement. Il s'identifiait à ces sentiments. Il les partageait, même. Mais contrairement à B'Elanna, il n'avait pas de famille. Rien n'avait changé dans sa vie, mais ce style de vie n'était simplement plus aussi attirant pour d'autres raisons.
"Et pour toi ?" demanda B'Elanna, soudainement intéressée par la conversation. Elle se retourna vers lui, ramassant ses jambes contre elle et enserrant ses genoux entre ses bras. "Le Maquis te manque-t-il ?"
Chakotay réfléchit un instant. "Quelques fois, se décida-t-il finalement à dire, se demandant comment expliquer sa réponse. En toute honnêteté, il n'était pas sûr de pouvoir l'expliquer clairement. Il n'était pas sûr de le savoir lui-même. Il avait eu le temps d'y penser pendant qu'ils étaient dans le quadrant Delta... Et bien qu'il ne désirât plus être un membre d'un mouvement de résistance, certaines fois, cela lui manquait.
B'Elanna reporta son regard vers le mur, sentant que la conversation était terminée. Pourtant, Chakotay continua.
"Certains aspects me manquent", dit Chakotay sur un ton distant. "Le style de vie me convenait... Mais maintenant je ne pourrais plus le faire."
Demander pourquoi était une question qui lui brûlait les lèvres, mais B'Elanna se força à se taire, n'aimant pas elle-même qu'on la force à révéler son passé. De ce fait, elle forçait rarement les gens à le faire.
Chakotay soupira. Il voulait le dire à B'Elanna, mais il n'était pas sûr qu'il pouvait le lui expliquer correctement... ou à n'importe qui d'autre. Il n'avait pas perdu foi en la cause, ni gagné aucune tendresse pour les Cardassiens. Mais il avait laissé ça derrière lui, il était passé à autre chose. Il gardait néanmoins une profonde sympathie pour quiconque était opposé aux Cardassiens pour des raisons personnelles, comme les siennes. Mais il ne sentait plus ce besoin de les combattre, de leur faire payer leurs crimes.
Finalement, il expliqua simplement, "je suis quelqu'un de différent, maintenant... Avoir été coincé dans le quadrant Delta m'a donné beaucoup de temps pour penser à tout cela. J'en suis venu à me dire que je ne pourrais plus m'investir dans un autre mouvement de résistance désormais, sauf si la cause me tenait vraiment à coeur, et encore peut-être même pas."
B'Elanna hocha la tête en signe de compréhension, écoutant avec attention chaque mot qu'il disait. Ce n'était pas la première fois qu'ils parlaient tous les deux de leur passé dans le Maquis, mais chaque fois, elle découvrait quelque chose de nouveau à propos de Chakotay. Elle trouvait leurs conversations fascinantes, il y avait tant à apprendre de lui, bien qu'elle le classât parmi les personnes qu'elle connaissait le mieux.
"Je vais te dire ce qui me manque", dit Chakotay soudainement sur un ton beaucoup plus vif. Il sourit à B'Elanna, soudain animé et parlant rapidement. "Les parties de poker que nous avions le soir quand tout était tranquille."
B'Elanna secoua la tête, le sourire aux lèvres. "Tu n'as jamais été très bon aux cartes, Chakotay."
"Je me souviens t'avoir battu une fois ou deux", lui répondit-il, se remémorant ses quelques victoires.
"Oui, quand tu avais la main heureuse", se défendit B'Elanna. Elle fut sérieuse pendant un instant. "Nous avons eu de bons moments avec le Maquis, n'est-ce pas ?"
"Oui, c'est vrai", dit-il, lui-même très sérieux. "Tout n'était pas mauvais, il y a eu beaucoup de choses que j'ai faites dont je suis fier... de nombreuses erreurs aussi. Mais il y a toujours eu de bons moments, même dans les mauvais moments."
Il redoutait son interrogatoire. Il était conscient qu'ils lui poseraient des questions indiscrètes, non seulement à propos du Voyager, mais également à propos de son passé dans le Maquis, lui rappelant probablement des souvenirs douloureux. Il n'était pas fier de tout ce qu'il avait fait en servant le Maquis, et il avait laissé beaucoup de choses derrière lui. Chakotay n'était pas impatient de parler de ces choses-là. Il pouvait le faire avec B'Elanna. Mais dans une pièce remplie d'inconnus ?
B'Elanna le regarda, se demandant si elle pouvait lui poser la question qu'elle avait à l'esprit ou non. Après une courte pause, elle se décida. "N'as-tu jamais regretté d'avoir rejoint le Maquis ?"
"Non", répliqua instantanément Chakotay, se surprenant lui même de la rapidité de sa réponse. "Je pourrais regretter certains de mes choix, certaines de mes actions que j'ai faites au nom de la cause, mais je ne regrette pas cela. A l'époque, c'était la seule chose à faire, quitter Starfleet et défendre mon peuple. Je ne pouvais rester un officier de Starfleet après qu'ils n'aient pas réussi à protéger ma famille, mes amis. J'ai donc rejoint le Maquis pour faire ce que je pouvais pour aider leur cause. Peut-être aussi pour me venger... Dans un certain sens, je pense que je voulais faire payer aux Cardassiens ce qu'ils avaient fait à ma planète. Mais plus encore, je voulais être sûr que la tragédie de Trébus ne se reproduirait jamais sur aucune colonie ressemblant à ma planète, assez heureux d'être encore en vie. Il n'y a aucune raison pour que je regrette cela."
B'Elanna inclina la tête en l'écoutant parler. "Mes raisons n'étaient pas aussi louables", admit-elle. "J'ai rejoint le Maquis parce que j'avais besoin d'un travail. Après que les Cardassiens aient attaqué le vaisseau et tué le Capitaine, je n'avais nulle part où aller. Tu avais besoin d'un ingénieur adroit, j'en étais un. Cela servait nos intérêts à tous les deux."
"Sois heureuse de ne pas avoir de nobles raisons", la coupa-t-il, parlant par expérience. "Mes 'nobles raisons' étaient d'avoir perdu ma famille dans une attaque brutale. Je suis content que tu n'aies pas vécu la même chose. Je ne le souhaite à personne."
"N'aurais-tu pas préféré avoir des gens comme ça ?" demanda B'Elanna. "Cela nous aurait peut-être évité d'avoir des espions comme Tuvok dans nos rangs... Cela aurait pu assurer notre loyauté."
"Mais cela n'aurait pas stoppé les espions", argumenta Chakotay. "Nous effectuions quand même des vérifications, et cependant Seska nous à rejoint, tu te souviens ? Tout le monde pouvait mentir, B'Elanna. Je comprends ce que tu veux dire, mais nous ne pouvions pas nous épier les uns les autres ou clamer qu'ils étaient des amis ou des parents de victimes."
"C'est vrai", dit B'Elanna, pensant un instant à Seska. Changeant légèrement de sujet, elle dit à voix haute, "elle me manque. C'est idiot... C'était un traître qui nous a tous menti et un membre de la race que j'ai appris à détester, mais elle a aussi été une amie pendant si longtemps."
Chakotay ne parlait plus, et pendant un instant B'Elanna eut peur d'être allé trop loin dans la conversation. Elle savait combien la trahison de Seska avait blessé Chakotay. Ils avaient, après tout, été amants pendant un temps. Seska avait menti à Chakotay plus qu'à toute autre personne, en prétendant l'aimer, l'utilisant de façon si intime pour gagner sa confiance et rassembler des informations.
De plus, Seska avait joué avec son affection. Pendant sa relation avec Chakotay, elle était parvenue à connaître parfaitement son caractère, ce dont elle s'était ensuite servie à son avantage. Mentant, elle lui avait dit qu'il était le père de son fils dans un stratagème pour prendre le contrôle du Voyager. B'Elanna ne pouvait blâmer le fait qu'elle ne manquât pas à Chakotay, peut-être même méprisait-il ou détestait-il Seska. La femme Cardassienne l'avait blessée d'une telle manière qu'il ne pourrait certainement pas oublier.
"Elle ne me manque pas", dit-il finalement, regardant B'Elanna dans les yeux en parlant sur un ton dur. "Comment le pourrait-elle ? Ce n'est pas le fait qu'elle ait été un espion Cardassien, bien que ce fut déjà assez mauvais en soi. Mais..." Il se tut, semblant incapable de finir sa phrase.
B'Elanna hocha la tête en signe de compréhension. Elle regrettait d'avoir amené un sujet si douloureux. Elle savait combien il était difficile pour lui de parler de son passé avec Seska. Elle changea rapidement de sujet. "Vas-tu aller rendre visite à Sveta, quand tu seras libre ?" lui demanda-t-elle curieusement.
"J'aimerais, oui", dit Chakotay en réfléchissant à cette possibilité. "Ca dépend si je peux arranger une visite avec Starfleet un de ces jours. Ils pourraient ne pas aimer cela... Ils pourraient voir cela comme une conspiration du Maquis."
"Oui, j'en suis sûre", dit B'Elanna à voix basse. Elle regarda à nouveau autour d'elle dans la pièce, comme si elle se rappelait leur situation actuelle. "Ils voient des conspirations partout... Je suis sûre qu'ils nous écoutent, que nous sommes surveillés constamment. Je connais suffisamment l'état-major de Starfleet pour les en savoir capable." Elle observa la pièce, ses yeux à la recherche du moindre indice trahissant la présence de quelque appareil de surveillance.
"Techniquement, nous sommes des criminels, B'Elanna", lui rappela-t-il. "Starfleet est dans son droit de nous garder ici et d'avoir un oeil sur nous."
"Cela ne me met pas plus à l'aise", dit B'Elanna, soupirant. "Crois-tu que le reste des anciens membres du Maquis va subir le même genre de traitement ?"
"Cela semble probable", décida Chakotay.
A cet instant, les portes s'ouvrirent soudainement, et Chakotay et B'Elanna se retournèrent vers les panneaux métalliques. Sur le seuil se tenaient les deux mêmes officiers de la sécurité qui étaient venus chercher Tom plus tôt. Soudain, B'Elanna se rendit compte comme le temps était passé vite, et elle conclut immédiatement qu'il était maintenant l'heure du compte-rendu de Chakotay.
"Monsieur Chakotay, voulez-vous nous suivre, s'il vous plaît ?" dit l'un des gardes en s'adressant à l'ancien Premier Officier du Voyager.
Chakotay se leva, posant une main sur l'épaule de B'Elanna. "Je te vois tout à l'heure", dit-il avec un sourire.
"Bonne chance", lui souhaita B'Elanna avec demi-sourire, mais sur un ton sincère.
Chakotay la remercia, enleva sa main puis traversa la pièce pour sortir avec les gardes. La porte se referma, laissant B'Elanna seule dans ses pensées.
 
******
 
Assise sur le lit, Seven of Nine regardait la pièce vide. Les murs blancs et le mobilier spartiate ornaient la salle d'interrogatoire, lui donnant l'air stérile et vide de tout sentiment. Une odeur de désinfectant flottait dans l'air, comme si la pièce venait juste d'être nettoyée.
Elle était fatiguée, fatiguée d'être maintenue en captivité en attendant que Starfleet ait terminé de l'examiner. Ils étaient trop intéressés par ses propriétés mi-borgs à son goût, mais elle ne pouvait rien y faire si ce n'est souhaiter être libre.
Quelque chose au plus profond de son esprit poussait pour atteindre sa conscience. Elle prit une profonde respiration et le repoussa le plus fortement possible, essayant de vider son esprit. Pendant un moment, elle y réussit, mais l'entité l'attaqua de nouveau, submergeant facilement les défenses de son esprit et envoyant son esprit dans le chaos.
Contrainte par l'être qui se trouvait à l'intérieur de son cerveau, Seven s'éjecta du lit et se jeta droit dans l'ouverture de la porte sans un regard en arrière. Elle tourna à droite et courut aussi vite qu'elle le put dans le couloir, sans s'arrêter et sans réfléchir. Elle ne savait pas où elle allait, ni pourquoi elle y allait. Tout ce qu'elle savait, c'était qu'il fallait qu'elle s'échappe de son emprisonnement.
Et c'est ce qu'elle fit.
 
*****
 
Chakotay suivait les gardes à travers le dédale de couloirs dans le quartier général de Starfleet. Ils marchaient en silence. Il supposait que les gardes n'étaient pas autorisés à parler de quoi que ce soit avec lui. Le quartier général était incroyablement calme et il présumait qu'il devait être plus tard qu'il ne le pensait.
Normalement, le bâtiment était agité par toute l'activité, les officiers de Starfleet évoluant à grandes enjambées dans les couloirs, les délégations d'aliens visitant le site et les différents amiraux marchant tranquillement autour du bâtiment sans urgence pour se rendre à leur prochaine réunion. Mais les couloirs étaient pratiquement vides et les seules personnes que l'on rencontrait étaient les officiers de la sécurité.
Chakotay hocha la tête, pensant intérieurement. A quel point Starfleet pensait-il que le maquis était une menace ? En dépit de leurs récents accords, Chakotay savait que les hommes et femmes qui avaient servi sous ses ordres longtemps auparavant avaient maintenant changé.
Et en aucun cas, la poignée restante de membres du Maquis ne pouvait être suffisante pour être considérée comme une menace par la Fédération, même si leurs intentions l'avaient été, comme Starfleet le suspectait.
Suivant les gardes dans un autre couloir, ils s'arrêtèrent finalement à côté d'une porte métallique. L'un des gardes pressa la sonnerie et immédiatement, une voix autoritaire provenant de l'intérieur répliqua, "Entrez."
Chakotay suivit le garde dans la grande pièce aérée. C'était l'un de ces étages qui dispensait une vue magnifique sur la baie de San Fransisco, facilement visible à travers la large baie vitrée.
Au centre de la pièce se trouvait une grande table ovale, autour de laquelle étaient disposées de confortables chaises grises. Autour de la table, certains membres de l'amirauté de Starfleet étaient assis, parlant entre eux, buvant un verre d'eau, faisant défiler des informations contenues dans leurs tablettes de données que Chakotay présumait être son dossier personnel.
Au bout de la table, l'amiral Hayes était assis. Chakotay connaissait vaguement cet homme, sachant qu'il était responsable des interrogatoires. A l'opposé de Hayes, il y avait une chaise vide, visiblement à son intention.
"Monsieur Chakotay", fit Hayes d'un léger signe de tête. "Veuillez vous asseoir." C'était un ordre, pas une requête, et Chakotay obéit, bougeant sa chaise pour y prendre place. Les gardes qui l'avaient escorté restèrent aux abords de la porte pour assurer le rôle de vigiles.
Il y eut un bref moment de silence tandis que l'Amiral Hayes se concentrait sur le défilement des données de sa tablette, avant qu'il ne regarde Chakotay. "Pouvons nous commencer ?" demanda-t-il sur un ton inamical, à la limite de l'insolence. Les craintes de Chakotay se confirmaient. Il réalisait que Hayes ne rendrait pas cela simple.
"Veuillez en premier lieu faire état de vos nom et ancienne désignation pour les enregistrements officiels", demanda Hayes. Il accentua le mot 'ancien', tentant de faire ressortir le fait qu'il était le supérieur de Chakotay.
"Chakotay, ancien Commandeur de l'USS Voyager", commença Chakotay, essayant de garder un ton serein. Il appréciait de ne plus être un officier de Starfleet, et n'en éprouvait aucune nostalgie, mais il n'aimait pas la façon dont Hayes le lui faisait ressentir.
"Bien." Hayes regarda ses collègues, puis Chakotay. Il lança un regard aux données et continua. "Visiblement, le plus logique serait de commencer par le commencement. Comment vous êtes-vous retrouvé dans le quadrant Delta ?"
Chakotay le regarda, légèrement déstabilisé par la question, pensant que tout le monde était au courant. Néanmoins, il commença à parler. "Nous étions dans les Badlands, en conflit avec Gulevek. Une vague de distorsion que nous étions incapable de contourner nous a frappé, et nous nous sommes retrouvés dans le quadrant Delta, balayés par ce qui semblait être une sorte de réseau..."
"Stop" l'interrompit Hayes, levant une main. "Avez-vous tenté de découvrir ce qu'était ce réseau, et pourquoi il vous avait amené là ?"
"Nous n'en avons pas eu le temps avant d'être transporté à bord du réseau et soumis à des tests."
"Quelles sortes de tests?" fut-il coupé immédiatement.
Chakotay soupira. "Compatibilité. Il tentait de trouver un humanoïde compatible qui pourrait prendre en charge les Ocampas après sa mort."
"Pourquoi ?"
"Avec tout le respect qui vous est dû, je ne vois pas ce que cela révèle..."
Hayes leva la main pour faire taire Chakotay. "Veuillez répondre à la question, s'il vous plaît."
Essayant de cacher son irritation, Chakotay répondit calmement. "Il se sentait responsable des Ocampas. Il tentait de trouver un héritier à la position de tuteur pour leur peuple."
"Et quelle a été la nature de ces... tests de compatibilité ?"
"Pour la plupart, ils étaient biologiques", ajouta Chakotay. "Le docteur détermina plus tard qu'il y avait également eu des tests de niveau mental, mais il n'a pu déterminer exactement ce que... si le tuteur fouillait pour trouver n'importe quoi d'utile ou bien s'il recherchait quelque chose en particulier."
"Bien." Hayes médita un instant, faisant défiler les données sur sa tablette. "Merci, Monsieur Chakotay, cela se révèle... des plus intéressant. Bien, allons un peu plus loin. Que pouvez-vous nous dire au sujet des problèmes que vous avez rencontré lors du choix du nouveau Chef Ingénieur ?"
Chakotay réfléchit un instant, résistant à l'envie de demander quel pouvait bien être l'intérêt d'une telle question. Il était conscient que le compte-rendu était supposé mettre à jour les évènements importants qui s'étaient passés dans le quadrant Delta, pas les mineurs. Et certainement pas tout le voyage de retour. Néanmoins, il continua.
"Le chef ingénieur du Voyager avait été tué lorsqu'ils avaient été catapultés dans le quadrant Delta. Nous avons bien évidemment..."
"Nous ?"
Serrant les dents, agacé, Chakotay dit, "J'étais déjà le Premier Officier du vaisseau."
"Je vois." Hayes fit signe à Chakotay de continuer.
" Nous devions nommer un nouveau chef ingénieur. Nous avions réduit notre choix à deux personnes, Joe Carey et ..."
"Excusez-moi, excusez-moi", l'interrompit Hayes une fois encore. "Vous dîtes 'Nous avions réduit'. Cependant, n'est-il pas exact que le Capitaine Janeway avait déjà choisi Joseph Carey et était réticente à confier ce poste à Madame Torres ?"
"Si vous le savez déjà, pourquoi me le demander ?" dit Chakotay sur un ton bas. C'était pour le moins frustrant. Cela ressemblait plus à un interrogatoire qu'à un compte-rendu.
"Nous avons nos raisons, Monsieur Chakotay", dit Hayes sombrement. "Vous disiez donc ?"
"Nous avions réduit à deux nos choix, à savoir Joe Carey et B'Elanna Torres. Tous deux étaient de talentueux et compétents ingénieurs. A la fin, B'Elanna a été choisie en prouvant son habileté et son esprit d'initiative au Capitaine Janeway quand elle nous a aidé..."
"Juste pour cela ? tonna Hayes. "Vous voulez dire honnêtement que vous n'avez pas appuyé la candidature de B'Elanna ?"
"Bien sûr que je l'ai fait", répliqua Chakotay, près de perdre son sang froid. Il était calme de nature, mais l'attitude de Hayes devenait ridicule. "Mais je n'ai rien fait qu'elle ne voulait pas. J'ai simplement souligné au Capitaine qu'elle était compétente pour ce poste et qu'elle devait être prise en considération. Je n'ai pas forcé la décision, ni usé de ma position sur le vaisseau pour influencer le Capitaine en quoi que ce soit. J'ai simplement demandé à ce que B'Elanna soit à égalité avec Monsieur Carey. C'est tout."
"Je vois", dit Hayes calmement. "Merci. Bien, maintenant... Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, quels étaient vos sentiments à l'égard de Monsieur Paris au début de votre périple ?"
"Je ne l'appréciais pas à cause de ce qui s'était passé dans le Maquis", répondit Chakotay honnêtement. "Cependant, avec le temps..."
"Je vous ai demandé au début de votre périple", le corrigea Hayes méchamment. "Quels étaient vos sentiments envers Monsieur Paris quand vous avez embarqué à bord du Voyager pour revenir vers le quadrant Alpha ?"
"Je n'avais pas confiance en lui et je ne l'aimais pas", dit Chakotay en repensant à ces jours-là. "J'avais peu de respect pour lui, il était trop insolent, toujours sûr de lui. Il prenait trop de risques, mettait en danger tout le monde. Je n'aimais pas ses manières, sa façon de faire. Je n'appréciais pas le fait qu'il place si peu d'intérêt dans ce qui était pour moi et les autres nos valeurs. "
"En un mot", dit Hayes comme Chakotay finissait, "il n'y avait aucune amitié entre vous et Monsieur Paris ?"
"Essentiellement, oui." accorda Chakotay.
"Bien", acquiesça Hayes. "Quels furent vos sentiments envers lui quand il crut avoir commis un meurtre sur la planète des Baneans ?"
"J'étais déçu", dit Chakotay prudemment. "Il a déçu le Capitane Janeway et l'équipage du Voyager. Cependant, je n'étais pas surpris. Je m'étais toujours attendu à ce genre de chose, j'appréhendais le moment où cela arriverait."
"Le croyiez-vous coupable de ce crime avant qu'il ne prouve qu'il était innocent ?"
"Oui", dit Chakotay, une note de culpabilité dans la voix. "Je pensais vraiment qu'il avait commis ce crime. Le capitaine Janeway et Tuvok l'ont écouté, l'ont cru quand il leur disait qu'il n'avait pas fait cela. Mais moi, je l'ai jugé sur ce que je connaissais de son caractère, sans regarder les indices pourtant évidents et sans écouter ses revendications."
"Est-ce que vous avez fait cela avec d'autres membres de l'équipage ?"
"Bien sûr que non", répliqua Chakotay rapidement.
"Alors vous avez isolé Monsieur Paris ?"
"Je n'ai pas dit cela", rétorqua Chakotay
"Mais vous l'avez sous-entendu", dit Hayes sur un ton exaspéré.
"Non, c'est faux", dit Chakotay, la voix montant tout en lançant un regard furieux à Hayes de l'autre coté de la table, perdant temporairement le contrôle de lui-même. "J'ai simplement admis que je n'appréciais pas Monsieur Paris au début, que je croyais qu'il avait commis ce meurtre, ce qui était faux. Cela a été une erreur de ma part et je l'ai reconnu. Pouvons-nous continuer maintenant, s'il vous plaît ?"
"Très bien", dit Hayes, semblant écarter la requête de Chakotay.
Tentant de regagner son calme, Chakotay prit une gorgée d'eau. Ce 'compte-rendu' était exactement ce à quoi il s'était attendu et avait craint de pire. Ils étaient en train de ramener à la surface tous les souvenirs qu'il avait enfouis au plus profond de son esprit. Il n'était pas fier de nombreuses choses qu'il avait fait, et il était sûr qu'ils allaient toutes les mentionner. Il redressa la tête vers Hayes quand celui-ci recommença à parler.
 
***
 
B'Elanna jouait avec un petit cadre. C'était une photo de Tom, Miral et elle. C'était la seule chose personnelle qu'elle avait apportée avec elle, un souvenir de ces temps heureux, et de ceux qui pourraient l'être à nouveau.
Son regard était empli de tristesse quand elle pensait à sa famille. Au début, elle avait réussi à passer outre la séparation, mais maintenant que Tom était parti, les choses étaient pires. Pour la première fois depuis longtemps, elle était seule. Depuis son plus jeune âge, B'Elanna avait toujours été plutôt anti-sociale, n'aimant pas la compagnie des gens. Même dans le Maquis, elle avait été connue pour être une personne secrète. Il y avait peu de gens avec lesquels elle avait partagé quelque chose de plus, comme avec Chakotay et Seska. Et pourtant même à eux, elle avait révélé très peu d'elle même. Elle leur avait toujours refusé l'accès à sa vie privée, passé un certain point.
Sa période à bord du Voyager l'avait guérie de ça. L'isolation dans le quadrant Delta lui avait permis de nouer des relations amicales avec Harry et Tom, et elle avait renforcé celle avec Chakotay. Graduellement, petit à petit, B'Elanna Torres était sortie de sa cachette, et maintenant d'après ses propres critères, elle avait besoin de cette camaraderie.
Mais plus que tout, Miral et Tom lui manquaient. Etre mariée à Tom lui avait apporté plus de bonheur qu'elle n'en avait jamais connu. Et Miral avait comblé leur vie. Etre loin d'eux quand elle savait que sa famille avait besoin d'elle la rendait folle, son sentiment de responsabilité refaisait surface.
B'Elanna sortit de sa rêverie quand la porte s'ouvrit. Elle releva la tête vers la porte pour voir qui était le visiteur en sachant qu'il n'était pas encore l'heure de son compte-rendu. Un visiteur non attendu.
Sur le seuil de la porte se tenait le Docteur holographique, entouré de deux gardes.
"B'Elanna." Il entra dans la pièce. "J'ai besoin de votre aide. J'ai l'autorisation de Starfleet pour vous libérer sous ma responsabilité pendant quelques heures, du moment que nous restions dans les locaux de Starfleet."
"Docteur, qu'y a t il ?" demanda B'Elanna en le suivant hors de la pièce, essayant de marcher aussi vite que lui.
"Les implants de Seven ont eu une... défaillance", mentit le Docteur. Il n'avait jamais menti auparavant, mais il ne voulait pas prendre le risque d'être surpris par qui que ce soit. D'un autre coté, il n'avait pas le temps de tout expliquer à B'Elanna, surtout qu'il n'était pas lui-même certain de ce qui se passait. Il savait que c'était plus qu'un défaut, mais il ne savait pas exactement ce que c'était.
"Que s'est-il passé ?" l'interrogea B'Elanna, hors d'haleine par ce soudain exercice.
"Seven se comporte... bizarrement", dit le Docteur. Il était incapable de décrire cela autrement. "Durant son compte-rendu, Starfleet a décidé qu'elle avait besoin d'un examen psychiatrique durant lequel elle a fait une crise."
"Aucune idée de ce que c'était ? Aucune théorie ?" demanda B'Elanna.
"Pas une seule valable que je désire partager avant que nous ne l'ayons examiné à nouveau", répondit le Docteur en tournant rapidement vers un autre couloir.
"Pourquoi avez-vous besoin de moi ?" demanda B'Elanna promptement. Elle manqua de peu de percuter un homme qui arrivait en face en suivant le Docteur, courant plus qu'elle ne marchait.
"Je suis Docteur, B'Elanna, pas ingénieur. Vous connaissez les implants de Seven mieux que personne. Vous avez l'habitude de cette technologie."
B'Elanna allait répondre quand ils entrèrent dans l'infirmerie de Starfleet. Son attention fut attirée par la Borg sur le lit médical, fermement maintenue par des sangles. Deux personnes de la sécurité se trouvaient à ses cotés, observant avec attention chacun de ses mouvements. Ils semblaient soulagés de voir entrer le Docteur et B'Elanna.
B'Elanna regarda le Docteur. "Etait-elle comme ça quand vous l'avez laissée ?" dit-elle, préoccupée.
Le Docteur acquiesça. "Elle était dans ce même état quand elle s'est échappée de son évaluation psychiatrique. Je ne comprends toujours pas comment ils ont réussi à la rattraper. Elle a dû se débattre. Mais avec son esprit et son intelligence, je pensais qu'elle pourrait s'échapper facilement d'ici. Cependant, je suis content d'avoir eu tort."
B'Elanna regarda à tour de rôle le Docteur et Seven. "En quoi avez-vous besoin de mon aide ?"
"Et bien je me demandais si vous pourriez regarder ça..." Le Docteur ne termina pas sa phrase, mais fit un mouvement de la tête vers sa console. B'Elanna le suivit du regard.
La pièce sembla soudainement floue à Seven of Nine. Elle cligna des yeux rapidement, leur permettant ainsi de s'adapter. Elle entendait des voix dans le lointain, comprenait des bribes de conversations. Elle se tourna sur le flanc gauche pour repérer d'où venaient les voix. Le Docteur et B'Elanna se tenaient près de la console, absorbés par leur travail, regardant alternativement Seven et leurs données. A ses côtés se tenaient deux gardes de la sécurité qui la surveillaient avec attention. Ses bras étaient fermement attachés au lit médical par des sangles en métal. Elle essaya de se relever, mais les sangles l'empêchaient de faire le moindre mouvement.
"Pourquoi suis-je là ?" demanda-t-elle, s'adressant directement au Docteur. Le Docteur et B'Elanna échangèrent un regard avant de s'approcher du lit.
"Seven ?" demanda le Docteur en regardant à deux fois la jeune femme allongée sur le lit médical. La constitution de Seven le surprenait et il ne comprenait pas comment elle avait récupéré si vite.
"Oui, Docteur ?" Sa voix était étrange. "Puis-je savoir pourquoi je suis attachée ?"
"Vous ne vous souvenez pas ?" demanda B'Elanna en regardant le Docteur.
"Non", dit Seven d'un ton confus, "Non".
"Quelle est la dernière chose dont vous vous souveniez", demanda gentiment le Docteur.
"J'étais dans mes quartiers", leur dit Seven, "je lisais une communication de ma tante... et..." Elle s'arrêta un instant, "Je ne me rappelle de rien d'autre."
"Intéressant", marmonna le Docteur.
Seven regarda B'Elanna puis le Docteur. "Que s'est-il passé ?"
"Vous avez été envoyée au service psychiatrique pour une évaluation au milieu de votre compte-rendu, évaluation d'où vous vous êtes échappée", expliqua B'Elanna à l'ancienne Borg. "Ils vous ont amené ici et le Docteur vous a examiné. Il y a quelques minutes, vous luttiez contre les sangles pour tenter de vous échapper."
"Curieux", dit-elle, "je me m'en souviens pas."
"Il est possible que quelqu'un ou quelque chose ait affecté vos implants, provoquant cette légère perte de mémoire", conclut le Docteur en regardant sa tablette de données. Il lança un regard à Seven. "Je suis désolé, mais nous devons vous laisser les sangles, au cas où vous seriez à nouveau dans cet état. Vous pourriez être un danger pour vous ou pour les autres."
"Je comprends", dit Seven avec un hochement de tête. Elle sembla momentanément inquiète. "Ais-je... blessé quelqu'un ?"
"Vous avez blessé l'un des gardes de la sécurité", dit le Docteur tout en commençant à scanner la jeune femme avec un tricordeur médical, concentré sur les données qu 'il recevait. "Il a une côte cassée et quelques ecchymoses, mais rien que je ne puisse guérir." Il observait avec intérêt les données qu'il venait de recevoir. "Intéressant."
"Pourriez-vous lui transmettre mes excuses. Je suis... désolée."
"Bien sûr", la rassura le Docteur en la regardant pendant un instant, avant de reprendre son travail. Il retourna vers la console, son tricordeur en main. "B'Elanna, pourrais-je avoir votre aide ? Je pense que cela pourrait vous intéresser."
"Bien sûr", confirma B'Elanna avant de le suivre à travers la pièce, laissant Seven livrée à elle-même.
 
******
 
Owen Paris buvait le verre qu'il tenait dans ses mains, observant avec attention les données qui défilaient sur la tablette. Il tendait l'oreille au cas où Miral se réveillerait, réclamant quelque chose. Sa petite fille était rapidement devenue le centre de sa vie. Elle avait comblé le sentiment de vide laissé depuis que son propre fils avait grandi.
Pour la première fois en 17 ans passés dans Starfleet, Owen Paris avait finalement pris des vacances. Son travail avait été le centre de sa vie pendant si longtemps qu'il n'avait jamais trouvé utile de prendre des congés. Mais maintenant, il avait quelque chose sur lequel se concentrer. Il prenait soin de sa petite fille.
La sonnerie retentit, le faisant sursauter. Il se demandait qui pouvait bien être ce visiteur. Aucun n'était attendu et les visites surprises étaient des plus rares. Il se leva lentement de son siège et posa son verre et la tablette sur la petite table près de la chaise. Il traversa calmement la pièce en faisant attention à ne pas faire de bruit pour ne pas réveiller Miral. Il savait combien ses pas pouvaient résonner sur le parquet.
Il fut très surpris quand la porte s'ouvrit, laissant apparaître le visage de son fils. Il s'appuyait sur le bord de la porte d'une main, recoiffant ses fins cheveux blonds de l'autre.
Un moment passa, Le vieux Paris regardant le jeune. Owen restait silencieux, ne sachant pas très bien quoi dire. Il ne savait pas que Tom avait été libéré si tôt. L'aurait-il su qu'il n'aurait pas été surpris par cette visite impromptue. S'il y avait une chose dont il était certain, c'était de l'amour de Tom pour sa fille.
Tom aussi restait silencieux pendant qu'ils s'observaient l'un l'autre. Il n'y avait pas de salutations ni de plaisanteries à échanger. Finalement, Tom demanda sur un ton froid, "Où est Miral ?"
"Elle est en haut, endormie", répondit Owen sur un ton calme. Il s'écarta de l'entrée, permettant à Tom d'entrer. "Entre", dit-il à Tom pendant que celui-ci pénétrait dans la maison, avant de refermer les portes derrière lui.
Il y eut un silence gênant avant qu'Owen ne se décide à demander poliment, "comment vas-tu ?". Tom regarda son père avec froideur, et après un moment, répéta sa question initiale, "Où est Miral ?"
Sans tenter de parler à son fils, Owen se dirigea vers les escaliers, emmenant Tom dans la chambre où le berceau de sa fille avait été placé. Il devenait évident pour tous les deux qu'il n'y avait plus d'amour entre eux. Tom suspectait en lui-même que son père le regrettait, beaucoup plus que lui. Bien sûr, il se sentait légèrement triste par ce vide dans leur relation, surtout si vite après le long chemin qu'ils avaient fait pour se retrouver. Mais il savait qu'il serait difficile, voire impossible, de pardonner à son père.
La chambre jaune juste en haut des escaliers sembla familière à Tom dès qu'il entra dans la pièce. Il réalisa rapidement qu'elle avait été sa propre chambre quand il était enfant. Les souvenirs de son enfance lui revinrent en mémoire quand il s'approcha du berceau en pin qui trônait au milieu de la pièce.
Il regarda par-dessus le petit lit et se sentit soulagé en voyant Miral couchée là en sécurité et en bonne santé. Il savait qu'elle serait en sécurité, mais il ne pouvait le croire avant de l'avoir vu lui-même. Miral était trop importante pour lui pour qu'il puisse se satisfaire de la promesse de quelqu'un disant qu'il prendrait soin d'elle. Miral dormait dans le petit berceau. Elle était calme et heureuse, l'un de ses poings fermé sur ses lèvres rosées, et ses cheveux fins brillants étaient ébouriffés comme ceux de son père. Elle était couchée sur le côté en position fÏtale. La petite couverture jaune s'était enroulée autour d'elle pendant la nuit et ne couvrait plus que la moitié de son petit corps.
Prudemment, il sortit Miral de son berceau et la prit dans ses bras, la serrant contre lui. "Hey, mon ange". Il lui sourit quand elle s'étira, et elle ouvrit les yeux pour le regarder. Avant qu'elle ne commence à pleurer, il la berça gentiment, lui parlant doucement pour qu'elle s'apaise.
Owen se sentait mal à l'aise, comme si il s'était introduit dans une réunion privée. Cependant, Tom ne semblait pas faire attention à lui, uniquement concentré sur Miral. Sa fille lui avait tant manqué, il pouvait enfin la serrer dans ses bras. Il était peu enthousiaste à la remettre dans son berceau ou dans son porte-bébé, et laissa Miral appuyer sa tête sur son torse pendant qu'il la portait soigneusement.
Il se tourna soudain vers Owen. "Pourrais-tu envoyer les affaires de Miral dans notre nouvel appartement, s'il te plaît ?" demanda-t-il froidement, "nous avons temporairement obtenu un appartement à San Francisco, jusqu'à ce que B'Elanna soit libérée. J'apprécierais que tu les envoies là-bas."
"Certainement", accorda Owen en souriant à son fils. Tom ne le lui retourna pas et se tourna pour regarder ailleurs.
"A bientôt", dit Tom dans un souffle après quelques instants, jetant un regard à son père avant de marcher vers les escaliers. Une seule pensée occupait son esprit. Eloigner sa fille et lui-même de la maison de son père. Après les actions d'Owen, Tom ne voulait pas être plus longtemps près de cet homme.
"Tom, nous avons besoin de discuter de ça", dit Owen d'une voix calme, plaçant une main sur l'épaule de son fils.
Tom se dégagea de l'étreinte de son père. "Tu ne comprends pas. Il n'y a rien à discuter."
"Tu le crois vraiment ?" demanda Owen, ses yeux scrutant Tom à la recherche de la moindre trace de regrets. Malheureusement, il ne trouva rien d'autre que le regard glacial que lui adressait son fils.
"Oui, je le crois", répondit Tom décontracté, lui-même surpris par son sang-froid. "Tu as séparé ma famille, sans même essayer de nous garder ensemble. Tu aurais pu, tu aurais dû... essayer de nous laisser ensemble, user de ton influence, mais tu m'as enlevé ma petite fille." Il se détourna d'Owen pour faire face à la porte. "Je ne veux rien de toi, j'ai honte de t'appeler papa !"
Owen eut soudain un coup au cÏur, tandis que son fils sortait de la pièce. "Tu ne peux pas sérieusement vouloir dire cela", argumenta-t-il, appelant son fils avant que ce dernier ne lui coupe la parole.
"Ne présume pas pouvoir savoir ce que je veux dire ou non", lui rétorqua Tom furieusement. Il sentait la colère monter en lui, même après tout ce temps. Son père était la seule personne qui était capable de la faire enrager aussi vite.
"Tom..." Owen se dirigeait en haut des escaliers, suivant son fils, tout en sachant que ses tentatives resteraient probablement vaines.
"Fiches-moi la paix", dit Tom à son père, se retournant vers lui au milieu de l'escalier. Il gardait un ton serein, tentant de rester calme par amour pour son enfant. La dernière chose qu'il voulait était réveiller sa fille en perdant son sang-froid contre son père, peu importait la tentation qui lui brûlait les lèvres. Il descendit les dernières marches, conscient des bruits de pas qui se rapprochaient derrière lui. Furieux, se dirigeant vers la porte, Tom se demandait pourquoi il s'ennuyait à écouter son père. Il avait planifié de ne pas se battre avec Owen, juste de prendre Miral et s'en aller.
Tom ralentit lorsqu'il atteignit la porte et déplaça légèrement Miral pour libérer une de ses mains afin d'accéder au tableau de bord pour ouvrir la porte.
" Mon fils..." commença doucement Owen, plaçant une main sur l'épaule de son fils. Le contact était léger et Tom s'arrêta immédiatement. "S'il te plaît, j'ai besoin de discuter de cela. Je veux clarifier les choses."
Tom pouvait sentir les regrets de son père rien qu'à sa voix, le profond désespoir de sa requête. Lentement, il se retourna pour faire face à son père.
"Je suis désolé", dit honnêtement Owen, des regrets évidents dans le regard. "Je regrette ce qui s'est passé, vraiment, Tom. Je ne suis pas le genre de monstre qui voudrait séparer ta famille. J'ai fait ce que je pensais être le mieux et maintenant j'en paye le prix dans ma relation avec toi."
"Comment as-tu pu penser que briser la plus belle chose à mes yeux était ce qu'il y avait de mieux ?" demanda Tom en colère.
Owen soupira. "Je ne voulais pas dire ça, je ne voulais pas que les choses aillent si loin, je ne voulais pas que tout cela arrive. Je désirais le meilleur pour Miral."
Les mots de son père relataient une certaine vérité, et Tom réalisa qu'il était en train d'écouter ce qu'il lui disait. Miral commença à remuer dans ses bras, et son attention fut rapidement attirée par sa fille. Il la berça un instant pour la calmer.
"Comment puis-je te croire", demanda Tom en regardant Owen. Essayant de ne pas être déstabilisé par la réponse de son fils, Owen continua, comme s'il n'avait pas entendu, de justifier et d'expliquer ses agissements.
"S'il te plaît, crois-moi", dit Owen en regardant son fils droit dans les yeux. "Tom, quand tu étais jeune, je n'ai pas fait passer ma famille en premier. C'est une erreur que je regrette encore maintenant, et pour la première fois, j'ai la possibilité de réparer cela, et c'est ce que je veux. Miral ne vous a pas été enlevée parce que je voulais lui faire du mal à elle ou à toi, mais parce que je voulais qu'elle soit dans un environnement sain."
"Peut-être, mais la meilleure place pour elle aurait été d'être avec ses parents", argumenta Tom, sa voix montant d'un cran.
"Peut-être... peut-être pas", soupira Owen. "Tom, je ne veux pas me battre avec toi. J'ai fait ce que je pensais être le mieux à ce moment-là. Je ne peux pas changer ça, et peu importe. Mais je veux reprendre ma relation avec toi, mon fils, et crois-moi, je le veux."
Tom soupira. "Je ne sais pas si je pourrais te pardonner", admit-il. "Pour le moment, je ne veux rien de toi. Tu m'as enlevé mon enfant sans même essayer de combattre les ordres. Je ne sais pas s'il y a quelque chose que tu puisses dire ou faire pour effacer cela."
Owen sembla peiné. Comme Tom tournait son attention vers la porte, il demanda rapidement. "Pouvons-nous nous asseoir un instant, juste pour parler... tenter d'arranger les choses."
Après un moment de réflexion, Tom se surprit lui-même en hochant la tête en signe d'accord. Il se demanda en lui-même s'il n'était pas possible que leur relation s'améliore. Il entra dans le salon silencieusement, s'assit sur le grand divan beige, Miral toujours blottie dans ses bras. Owen le suivait et s'assit sur une petite chaise en face. Il y eut un bref silence avant qu'Owen ne commence à parler.
 
*****
 
"Je comprends", dit Seven, ne parlant à personne mais fixant le mur en face d'elle. "Je finirais la mission... Oui, je comprends."
B'Elanna se tenait à côté de l'ancienne Borg, concernée par cet inquiétant changement de comportement. Elle était incapable d'aider le Docteur jusqu'à ce qu'il ait pu déterminer la cause de cet étrange comportement. Elle l'avait déjà aidé autant qu'elle pouvait. Et avait décidé de rester aux côtés de Seven en attendant que le Docteur finisse ses analyses. Quelques minutes auparavant, Seven agissait normalement, mais soudainement son comportement avait radicalement changé, et elle avait commencé à parler tout haut. B'Elanna avait écouté, au cas où un nom aurait été mentionné. Mais rien ne suggérait qui, ou quelle, était la cause du soudain changement dans Seven. Cela ressemblait à une conversation à sens unique, mais B'Elanna n'en connaissait ni le début ni la fin.
De l'autre côté du lit médical, se trouvait le garde de la sécurité qui avait été affecté à l'infirmerie. Il croisa le regard de B'Elanna. "A-t-elle déjà fait ça avant ?" demanda-t-il, regardant Seven avec méfiance.
"Jamais", dit B'Elanna en soupirant. Elle se tourna vers la console de travail où était le Docteur. Il tapait furieusement sur le clavier, comparant, examinant, essayant désespérément de trouver quelque explication à ce changement de comportement.
"J'obéirai", dit Seven, la voix soudain plus forte. Ses yeux jetaient des regards furtifs autour de la pièce, en regardant chaque personne à tour de rôle. Elle serra les poings, tentant d'arracher les sangles qui maintenaient ses bras, les faisant s'entrechoquer violemment.
"Donnez-lui un sédatif", demanda B'Elanna au Docteur, luttant furieusement pour maintenir l'ancienne Borg allongée sur le lit médical avec l'aide du garde de la sécurité. Seven était forte, et B'Elanna ne savait que trop bien qu'elle pourrait arracher ses sangles si elle le désirait. Et dans son état d'esprit actuel, il lui apparaissait que s'était bien ce qu'elle pourrait essayer de faire.
Le Docteur se précipita vers le lit médical, une seringue hypodermique en main. Il injecta la toxine dans son cou et elle se relâcha immédiatement, s'allongeant sur le lit. B'Elanna lâcha son bras tout en continuant à la regarder. Elle semblait si calme tout d'un coup, comme si elle dormait profondément.
"Avez-vous trouvé quelque chose ?" demanda B'Elanna en fermant l'arche-diagnostic du lit médical au-dessus du corps inanimé de Seven. C'était une mesure de précaution. Avec Seven, ils ne savaient pas combien de temps le sédatif ferait effet et cette couche de métal en plus pourrait leur permettre de gagner de précieuses secondes pour la calmer, au cas où elle se réveillerait et déciderait de s'échapper.
"Je crois, oui", répondit le Docteur sur un ton étonnamment optimiste. "Je pense que j'ai isolé les problèmes. Ils sont concentrés dans ses implants. Je ne sais pas ce que c'est, mais je pense que je suis sur la bonne voie."
"Continuez, Docteur", dit B'Elanna avec encouragement en se retournant vers l'ancienne Borg inconsciente sur le lit médical.
"J'en ai l'intention", la rassura le Docteur, ne permettant jamais à leurs bavardages d'interférer dans son travail, ne serait-ce qu'un instant. B'Elanna savait qu'il pouvait accomplir de nombreuses tâches en même temps et avait souvent espéré posséder cette faculté ou l'acquérir. Regardant le Docteur, elle admit, "Nous pourrions être à court de temps, Docteur."
"Comment ça ?"
"Elle s'enfonce", l'informa B'Elanna d'une voix grave. "Avant que nous ne la calmions, ses... hallucinations devenaient plus intenses. Avant, au moins, elle avait quelques moments de lucidité, mais maintenant..." Elle soupira. "Je ne sais pas ce qui ne va pas chez elle, Docteur, mais nous pourrions la perdre. Cela pourrait devenir irréversible si nous n'agissons pas rapidement.
Le Docteur interrompit son travail pendant un moment pour faire face à B'Elanna. "Je travaille aussi vite que je le peux", lui promit-il. "Je refuse de croire ça, que c'est vraiment irréversible, pas avant que nous n'ayons cherché plus loin."
B'Elanna acquiesça, l'observant retourner à ses recherches. Elle n'arrivait pas à comprendre comment il pouvait être si optimiste dans un moment pareil. Il était de nature généralement optimiste, mais B'Elanna connaissait assez le programme pour interpréter son comportement. Elle avait rapidement déterminé que la situation était sérieuse. Quoi qui puisse altérer les implants de Seven, cette chose savait certainement ce qu'ils avaient l'intention de faire ou ce qu'ils projetaient de tester.
"Ha Ha !" s'exclama le Docteur, regardant B'Elanna. "Je pense que j'ai trouvé la cause... Regardez la mémoire du cortex de Seven." Il montra un grand graphique sur le moniteur. "Ils sont remarquablement similaires, mais avec de légères différences, surtout en deux points."
"Docteur, je suis ingénieur", lui rappela B'Elanna. "Qu'est ce que vous racontez ?"
"Vous vous souvenez quand la conscience du Commandeur Chakotay avait été séparée de son corps et qu'il avait pris le contrôle de votre corps un cours instant ?" demanda le Docteur. "Vous avez arrêté le réacteur de distorsion pendant que vous étiez sous son influence."
"Je m'en souviens", dit B'Elanna. "Vous voulez dire qu'elle est..." Elle s'arrêta un instant, cherchant le mot exact. "Possédée ?"
"Dans un sens, oui", répliqua le Docteur. "Cela ressemble beaucoup à votre mémoire quand la conscience de Chakotay avait pris possession de votre corps."
"Alors qui, ou quoi, est ce..." demanda B'Elanna en regardant le corps inanimé de Seven sur le lit médical.
"Tout ce que je sais, c'est qu'il y a deux consciences à l'intérieur de son esprit à en juger par les ondes cérébrales. Il y a clairement deux empreintes. Voyez par vous-même." Il confia la tablette à B'Elanna, montrant un autre graphique. Cette dernière regarda attentivement les données.
Finalement, elle demanda, "pourquoi garde-t-elle un contact entre les deux personnalités ? Cette chose ne devrait-elle pas prendre le contrôle de façon permanente ?"
"Pas nécessairement", dit le Docteur en marchant vers Seven. "Ce ne sont que des suppositions, bien sûr, mais mes meilleures hypothèses seraient que son esprit ne reste sous contrôle que temporairement, de temps en temps. Quand il n'en a plus besoin, l'entité se retire et l'esprit de Seven redevient maître de son corps."
"Fascinant", murmura B'Elanna, fixant Seven. "Qu'en pensez vous ?"
"Je ne sais pas", admit-il, retournant vers la console. "Je n'ai pas la moindre idée de la manière de faire pour l'extraire."
B'Elanna réfléchit un moment. "L'extraire... C'est peut-être là où vous avez tort, Docteur. Nous devons peut-être la détruire."
"Que suggérez-vous ?" demanda le Docteur en faisant défiler les données. "Car la seule option que je peux vous soumettre tuerait le patient par la même occasion."
"Laissez-moi regarder", dit B'Elanna en saisissant la tablette. "Peut-être pourrions-nous modifier l'une de vos idées... Dans quelle partie du cortex se manifeste l'entité ?"
"Elle semble être localisée dans les implants de Seven", dit le Docteur, méditant sur les données. "Je peux seulement vous dire que c'est le meilleur endroit pour contrôler le cerveau."
"Vraiment", dit B'Elanna, regardant distraitement les données qui défilaient devant ses yeux. Soudain, son visage parut s'éclairer. "Docteur, je pense que cela pourrait marcher, regardez ici."
"Quoi ?" demanda le Docteur, une lueur d'espoir dans le regard.
"Vous avez dit qu'une décharge d'énergie pourrait extraire l'entité. Cependant, cela pourrait avoir des conséquences sur le cerveau", dit B'Elanna lisant les données.
"Le risque est trop grand", protesta le Docteur.
"Bien, et si nous dirigeons la décharge dans ses implants ? L'entité est localisée là, donc cela la détruira. Mais plus important, les implants de Seven ont été fabriqués pour résister à ce genre de défaillance. Dans le cas où une décharge affecterait les implants et laisserait une personne gravement blessée, les implants ferment toutes les liaisons vers le cerveau. Seven pourrait être blessée et les implants pourraient avoir besoin d'être réparés, mais il n'y aurait presque certainement aucun dommage au cerveau. "
"Presque certainement ?"
"Il y a un risque dans chaque procédure médicale, Docteur", commenta B'Elanna. "Le risque est minime, mais il existe. Si vous voulez le faire, j'en prendrais la responsabilité..."
"Non", soupira le Docteur. "Cela semble être notre meilleure chance de la sauver. Moins de temps l'entité restera, moins elle fera de dommages."
"Donc... On y va ?" questionna B'Elanna
"Oui", dit le Docteur avec une légère hésitation. "Je pense que c'est un risque qu'elle aurait pris."
 
*****
 
Catherine ouvrit la porte de son appartement, entra et claqua la porte derrière elle. Elle était fatiguée après une longue et ennuyeuse journée au bureau. Elle alluma les lumières, se débarrassa de sa veste d'uniforme sur l'accoudoir de la chaise dans laquelle elle s'effondra rapidement.
Elle soupira, laissant sa tête aller sur le dossier du fauteuil, prenant quelques minutes de repos et de relaxation. Rester assise à son bureau la plus grande partie de la journée à ne rien faire d'autre que d'éditer et écrire des rapports l'avait vidé de toutes ses forces. Pour le moment, ses muscles lui faisaient horriblement mal. Elle avait un peu faim, mais n'avait pas envie de s'ennuyer à manger. Elle avait de toute façon trop de travail à faire et quelques heures de plus avant de manger ne lui feraient pas de mal.
Sur le haut de la pile de travail, les affaires actuelles concernant le Maquis lui occupaient l'esprit. Elle ne savait pas grand-chose de leur situation, mais ce qu'elle en connaissait l'ennuyait. D'après ce qu'elle avait entendu, ils étaient tous convoqués individuellement à des comptes-rendus ou audiences, étaient consignés dans les quartiers généraux de Starfleet jusqu'à ce que ces procédures soient terminées, et n'étaient pas autorisés à recevoir d'assistance de l'extérieur.
Aucune assistance extérieure, cela voulait dire qu'elle-même était incapable de les aider. Et elle était sûre qu'ils avaient besoin de son aide. Ca ne ressemblait certainement pas à Starfleet, ou à la Fédération dans ce cas, de laisser tranquille les anciens hors la loi, beaucoup trop préoccupé par leur passé de criminel de guerre.
Tout le Maquis, et surtout Chakotay, elle en était sûre, puisqu'il avait été leur chef, subirait des interrogatoires et des comptes-rendus des plus complets. Ils seraient interrogés à fond, sur leurs actions avant et pendant leur service à bord du Voyager. On leur poserait des questions sur la possibilité d'une mutinerie ou de toute autre sorte de révolte. Catherine savait que leurs réponses seraient examinées dans les moindres détails, que la commission d'enquête rechercherait la moindre phrase, le moindre sous-entendu qui impliquerait le Maquis dans toute action sortant de leur devoir d'officiers de Starfleet loyaux envers elle, et cela montrerait que Chakotay avait bien eu l'intention de fomenter une mutinerie.
Elle savait que ce n'était pas vrai. Il avait bien été question d'une mutinerie pendant quelques semaines parmi les plus contestataires des membres d'équipage, mais Chakotay avait été celui qui y avait mis fin. Elle savait, depuis le début, qu'il ne la trahirait jamais, et la plupart des maquisards avaient appris à partager sa loyauté avec le temps. Pour ceux qui ne l'avaient pas fait, et Seska et Jonas lui vinrent tout de suite à l'esprit, et bien ces derniers avaient connu de bien tristes destins, emportés par leur propre trahison.
Aucun des maquisards n'aurait jamais rien fait pour les blesser, elle ou Chakotay. Le problème était de convaincre la commission d'enquête de cela, ce qui était déjà des plus difficiles, empiré par la présence de l'Amiral Nechayev. Elle était connue pour sa haine du Maquis et ferait n'importe quoi pour les faire jeter en prison et les faire tomber en disgrâce.
Et Catherine ne pouvait même pas les aider.
Ils étaient son équipage, et elle ne pouvait même pas les aider quand ils avaient besoin d'elle. Elle ne connaissait aucun détail concernant leurs auditions en cours, mais elle savait qu'elle en apprendrait bientôt plus avec le début de la première affaire.
Elle doutait vraiment d'être autorisée à faire quoi que ce soit pour les aider... Mais faire une petite reconnaissance pourrait peut-être l'aider à voir s'il ne lui serait pas possible d'influencer quelques personnes. Bien que dans sa situation actuelle, elle doutait de l'efficacité que cela aurait, si au moins cela en avait, et n'avait que peu d'espoir de voir la situation évoluer par son implication.
Néanmoins, il n'y avait rien qu'elle puisse faire avant qu'elle n'en sache plus, et cela pourrait prendre un certain temps. Il n'y avait aucune raison de s'inquiéter de cela, car de toute manière, s'inquiéter ne ferait pas avancer les choses. Il lui faudrait autant de temps pour que cela fasse la moindre différence, et elle le savait. Elle tenta de se relaxer quelques instants avant de se concentrer à nouveau sur les rapports.
Elle regarda son appartement pour la millième fois. Il était désespérément semblable à celui qu'elle avait occupé avant qu'elle ne parte pour le voyage inaugural du Voyager. Cependant, l'appartement avait été occupé deux ans après sa disparition dans le quadrant Delta. Sa mère et sa sÏur avaient récupéré ses affaires personnelles. Elle les avait retrouvées à son retour sur Terre et apportées dans son appartement actuel. Son ancien appartement lui manquait quelque peu...
Celui-ci était meublé de façon spartiate, contenant le strict minimum pour vivre et quelques curieuses décorations par-ci par-là qui donnaient un côté plus 'chez soi'. La cuisine touchait par un côté le salon et une autre porte donnait sur sa chambre, attenante à la salle de bain, qui était relativement grande.
Une table de dîner était installée au milieu du salon, encadrée par quatre chaises, au cas où elle aurait des invités. Non pas qu'elle en ait déjà eu, bien sûr, les chaises étant juste là pour que la table paraisse complète. Catherine mangeait rarement à cette table, préférant prendre son dîner, quand elle mangeait quelque chose, sur le divan plus confortable ou dans le fauteuil dans lequel elle était assise, parce qu'ils étaient tous les deux placés en face de la fenêtre. Quelques peintures ornaient le mur. L'une représentait la campagne battue par le vent, une autre décrivait un vase de fleurs posé sur une table. La plus proche était une de ces photos représentant une plage avec des palmiers ondulant sous le vent.
Si elle regardait la photo de la plage assez longtemps, il lui était facile de s'évader dans ce paysage de rêve, où elle s'imaginait alors se relaxant tranquillement sur la plage, se prélassant au soleil, loin de cette agaçante Amirale Nechayev, de la pluie et de ce travail morne. Oh, que ne donnerait-elle pas pour une plage au soleil, tout de suite, laissant l'humide San Francisco, son ciel gris...
Son terminal de communication à côté de son fauteuil bipa, la sortant sans ménagement de sa rêverie. Se rasseyant correctement, elle fit pivoter le fauteuil sur la gauche et ouvrit la communication.
Gretchen Janeway apparut à l'écran. Le visage de sa mère était légèrement ridé, ses cheveux blancs parsemés de mèches auburn. Mais il y avait toujours cette noblesse, cette chaleur sur son visage, que Catherine, petite fille, essayait toujours de faire ressortir. Sa mère était maintenant plus vielle, ses traits plus âgés, mais elle avait toujours le même air pour elle.
"Maman !" s'exclama Catherine, surprise. Elle ne s'attendait pas à avoir un coup de fil, encore moins de la part de sa mère. Mais cela lui donnait la chance de parler à quelqu'un qui était la bienvenue, et elle lui sourit chaleureusement.
"Je ne pensais pas que tu m'appellerais." Sa voix trahissait encore un peu la surprise.
Sa mère sourit chaleureusement. L'affection qu'elle avait pour Catherine quand elle était petite illumina son regard encore une fois, réconfortant Catherine de tout son cÏur.
"J'ai pensé que je devais vérifier pour voir comment allait la plus vieille de mes petites filles", dit Gretchen avec amusement.
Catherine roula des yeux, sa bonne humeur ancrée en elle en dépit de tout. "Maman, au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, je ne suis plus exactement une petite fille", la réprimanda-t-elle en plaisantant.
Le regard de Gretchen pétilla quand elle lui répondit. "Tu l'es pour moi."
"Maman", grogna Catherine avec un léger avertissement, tentant de paraître ennuyée, mais échouant lamentablement. Les coins de ses lèvres se relevèrent légèrement pour dessiner un sourire en dépit de tous ses efforts pour le stopper.
"D'accord, d'accord", acquiesça Gretchen. "Mais sérieusement, Catherine, comment vas-tu ?, tu ne sembles pas aller bien."
Ne pas laisser sa mère s'inquiéter à propos de sa santé. "Je vais bien maman", la rassura-t-elle.
"Tu ne le sembles pas en tout cas."
"Tu ne mâches pas tes mots, maman ?"
"Non, pas plus que toi. Maintenant, dis-moi à quand remonte la dernière fois que tu as mangé quelque chose ?" Le visage calme de Gretchen cachait son inquiétude.
Catherine se remémora sa journée. "J'ai petit déjeuné ce matin et grignoté quelque chose à midi."
Gretchen soupira, inquiète. "Toi, ma chère, tu as besoin de manger. Sérieusement, Catherine, tu maigris et je suis vraiment inquiète pour toi."
"Je sais, maman, je sais", lui dit-elle. "Je mangerais, je te le promets. J'ai juste trop de choses à m'occuper pour l'instant. Je ne peux vraiment pas m'ennuyer à manger maintenant..."
"Tu ne peux pas juste avoir faim quand cela t'arrange, tu sais. Mais promets-moi que tu vas manger quelque chose bientôt... ou j'envoie Phoebe te chercher et te traîner à la maison pour dîner."
Catherine sourit à cette pensée. "D'accord maman, je te le promets." Elle se résigna à essayer de manger, sachant que sa mère essayait simplement de l'aider. Cela méritait un effort de sa part. Même si cet effort était réalisable, Catherine savait par expérience que le plus gros problème serait de trouver le temps de manger, et pas de trouver quoi manger.
"Bien", lui dit sa mère pendant que Catherine retournait son attention sur l'écran. "Bien, dis-moi ce qui t'angoisse autant pour que tu t'abstiennes de manger ?"
Catherine baissa le regard sur ses mains, posant les coudes sur la table. Elle avait la chance de pouvoir admettre ses inquiétudes à propos de la situation du Maquis, elle était prête à dévoiler ses pensées, mais elle n'était cependant pas sûre de savoir comment l'expliquer.
Catherine soupira. "Je ne sais pas, maman", admit-elle, "Je crois que... je suis juste inquiète." Elle laissa sa tête se baisser, et se massa les tempes avec deux doigts. Elle leva les yeux et bougea ses mains pour que sa mère comprenne.
"Ce que je veux dire, c'est que les maquisards font face à des procès et de possibles peines d'emprisonnement, et tout ce que je peux faire, c'est rester assise et regarder. Je ne sais même presque rien de l'affaire." Une partie d'elle-même savait que ce qu'elle disait n'avait ni queue ni tête, mais elle l'ignora et continua quand même. Cela lui faisait du bien de parler, de sortir tout ça hors d'elle.
"Je ne suis même pas autorisée à les aider. L'Amiral Paris ne veut pas m'expliquer pourquoi. Et je commence à être vraiment inquiète... Je veux dire, s'ils ne veulent pas que je les aide en disant combien leurs états de service ont été exemplaires sur le Voyager, s'ils ne veulent pas de moi à cause de mon implication, je ne peux que penser qu'ils veulent tous les juger coupables sans influence extérieure. J'ai encore les moyens de déplacer quelques pions sur l'échiquier, mais je ne crois pas que cela m'avancera beaucoup..." Elle soupira à nouveau. "Je crois finalement que quoi que j'essaye de faire, ils sont tout seuls. Et c'est cela, le fait qu'ils soient livrés à eux-mêmes, qui m'ennuie."
Catherine finit son discours, regarda l'écran et réalisa soudainement que sa mère avait patiemment écouté tout ce qu'elle avait débité. Elle se sentit immédiatement penaude d'avoir déballé ses problèmes personnels.
"Désolé maman", dit-elle avec un sourire ironique "Je me suis emballée à parler de ça..."
"Tu as besoin de parler de ça, Catherine", répondit Gretchen. "Je suis contente que tu l'aies fait, mais je ne sais vraiment pas quoi dire..."
"Ne t'en fais pas, maman. Je ferais avec, mais merci quand même." Elle s'arrêta un instant et changea de sujet. "Comment allez-vous, Phoebe et toi ?"
"Nous allons bien", dit Gretchen. "Phoebe est occupée avec son travail, comme d'habitude. Mais elle s'arrête de temps en temps pour passer me dire bonjour quand elle ne se ballade pas à travers le quadrant pour l'un de ses voyages d'affaires."
Catherine sourit. "Cela ressemble bien à Phoebe. Toujours ailleurs dans quelque folle excursion."
"Exactement. Quelques fois, je me demande comment elle arrive à trouver du temps pour faire quelque chose à la maison et tout laisser pour me faire une petite visite."
"Bonne question." Elle fit une pause. "Et qu'en est-il pour toi, maman. Comment vas-tu ?"
Gretchen lui donna l'un de ses sourires qui voulait dire 'oh, allons'. "Tu me connais, Catherine. Ranger la maison, cuisiner, jardiner, lire. C'est très relaxant, en fait. Tu devrais essayer de temps en temps. C'est moins stressant que de commander un vaisseau."
Le visage de Catherine s'illumina d'un sourire triste. "Je suis peut-être un Capitaine, maman, mais je n'aurais plus de vaisseau à commander, et quelques fois, le travail de bureau se révèle être pire. Néanmoins, je me suis mise au jardinage, crois-le ou non."
"Vraiment ?" demanda Gretchen, surprise. "Toi, jardiner ?"
"Oui, maman, moi. Les cours de base de jardinage que toi et papa nous avez appris y sont pour quelque chose. Encore que je n'aie pas grand-chose à jardiner dans les parages."
"C'est vrai. Il va falloir que l'on remédie à cela." Gretchen prit une profonde inspiration. "En fait, Catherine, la raison pour laquelle je t'appelais est un peu plus triste."
"Qu'y a-t-il ?" demanda Catherine, les sens immédiatement en alerte. "Que s'est-il passé ?"
"Ne t'inquiètes pas, Catherine. Cela n'a rien de dramatique", la rassura sa mère en faisant machine arrière. "Enfin, c'est peut-être quelque chose qui te révoltera..."
Génial, pensait Catherine. Maintenant, elle n'ose plus me dire ce qu'elle voulait.
"D'accord maman. Maintenant, je suis inquiète", dit elle. "Qu'est-il arrivé ?"
"Tu te souviens de Molly ?" lui demanda Gretchen. Elle pouvait voir au visage de sa fille qu'elle s'en souvenait. "Bien sûr que oui... Comme tu le sais, elle se faisait vraiment très vielle... Je crois qu'elle a finalement succombé à la vieillesse. Nous l'avons enterrée hier. J'ai essayé de t'appeler, mais tu n'étais pas chez toi. Le Docteur pensait qu'il fallait agir au plus vite afin de lui éviter de souffrir."
"Oh..." Catherine couvrit sa bouche de sa main de regrets. Molly avait été sa meilleure amie pendant des années. Elle l'avait sauvée des chenils pour chiots. Même après une absence de près de 7 ans, Molly avait sauté sur ses genoux dès qu'elle l'avait vue, heureuse de revoir son ancienne propriétaire. Catherine n'avait pas pu garder le chien avec elle dans son nouvel appartement, elle l'avait donc laissé à sa mère où elle avait vécu les sept dernières années, après que Mark ait décidé d'abandonner le chien, dans l'espoir de la voir quand il rendait visite à sa mère.
Et maintenant, Molly était morte... partie pour toujours.
Dans un sursaut, elle fut consciente qu'elle était perdue dans ses pensées, sa mère toujours en train de la regarder et d'attendre.
"Désolée, maman", dit-elle une seconde fois. "J'étais juste... en train de penser à Molly. C'était une bonne amie pour nous tous. J'imagine que je ne pensais pas que cela arriverait si vite. Je suis un peu choquée."
"Je sais. Nous l'avons tous été. Mais ça finit toujours par arriver, et nous devons faire avec. Qui sait, tu auras peut-être un autre chien."
"Peut-être. Je l'espère", dit Catherine, l'air absent.
Toutes les deux restèrent silencieuses durant un moment. Catherine brisa le silence lentement.
"Maman, je déteste t'expédier comme ça, mais je dois vraiment y aller... Je dois finir une tonne de travail et écrire une pile de rapports." Elle souhaitait intérieurement ne pas avoir à couper la liaison, mais elle savait qu'elle ne pouvait retarder plus longtemps son travail.
"Maman, je t'appelle bientôt, promis. D'accord ? Et je viens te voir dès que possible. Dès que j'aurai mis un peu d'ordre dans ce travail. Je veux vraiment m'asseoir un instant avec toi et Phoebe et passer du temps avec vous deux."
"D'accord, chérie." Gretchen lui adressa un sourire merveilleusement maternel. "Je t'aime, ma chérie."
"Je t'aime aussi, maman."
Catherine coupa la liaison et s'appuya sur le dossier avec un soupir, s'autorisant le luxe de penser à Molly encore quelques instants. Elle repassa particulièrement dans son esprit ses souvenirs.
Elle et Phoebe en train de laver le chien, tentant de lui donner un bain et de la nettoyer. C'était un jour ensoleillé, doux et chaud, dans l'Indiana. Ils avaient emmené Molly à l'extérieur, utilisant une grande baignoire, une brosse, et une éponge. Il leur avait d'abord fallu un certain temps pour mettre Molly dans la baignoire, et elles avaient finalement réussi à commencer à la nettoyer. Catherine arrosait Molly avec de l'eau savonneuse pendant que Phoebe la maintenait dedans. Mais c'est elle qui avait été arrosée quand Molly s'était soudainement échappée.
Elle n'avait jamais compris comment Molly avait pu sauter si rapidement de cette manière. Mais le chien l'avait fait, elle avait sauté hors de la baignoire, bousculant Catherine et Phoebe, galopant aussi vite qu'elle le pouvait, avant que les filles ne parviennent à la rattraper. En fait, elle n'avait pas été loin, elle avait juste fait le tour de la maison. Mais pendant que Catherine et Phoebe la cherchaient, elle avait réussi à se salir autant qu'avant. Elle les attendait près de sa niche quand elles la trouvèrent, sautillant gaiement.
Phoebe avait levé les bras au ciel et était rentré en riant, Catherine la suivant. Elle n'avait jamais pu s'empêcher de se souvenir de ce jour sans un sentiment d'affection. Et jusqu'à ce jour, le souvenir était resté intact jusque dans son émotion.
Avec un effort, elle se sortit de ses pensées. Elle aurait le temps pour rêver à cela plus tard. Pour le moment, elle avait du travail à faire.
 
*****
 
"Etes-vous prêt ?" demanda B'Elanna, regardant le Docteur à son poste de travail.
"Presque, oui", lui confirma-t-il en prenant un chariot sur lequel étaient placés les instruments, avant de l'apporter près du lit médical. "Je suis prêt quand vous l'êtes."
"Bien", dit B'Elanna, en prenant l'un des appareils circulaires. "J'administre la décharge." Elle regarda le Docteur. "Juste une légère pour commencer... ce sera peut-être suffisant."
"Compris", dit le Docteur. Il enfonça la touche du clavier et regarda B'Elanna. "Chargé à ... 20 ?". Il lança un regard à B'Elanna pour avoir une confirmation.
"Ca devrait être correct pour une première décharge", dit B'Elanna. Elle prit l'appareil avec précaution et l'apporta jusqu'aux implants de Seven. Le positionnant avec précision, elle pressa les boutons et relâcha la pression. Un léger courant bleu s'échappa du bas de l'appareil vers les implants de Seven. Le corps de la jeune femme bougea légèrement sous la décharge. Mais il n'y avait pas de signe de changement.
"Pas de réaction", rapporta le Docteur en surveillant l'affichage des ondes cérébrales. "Devons-nous essayer une autre décharge ?"
"Oui", dit B'Elanna, avant d'ajouter, "Vous devez réaliser qu'en augmentant la force de la décharge, nous augmentons le risque ?"
Le Docteur hocha la tête en signe de confirmation. "Chargé à 30", dit-il en se remettant aux commandes.
"D'accord", dit B'Elanna. Elle plaça l'instrument sur les tempes de Seven et libéra la décharge. Cette fois, le courant fut plus vif, et la réaction de Seven se remarqua plus. Son corps presque sans vie se cambra au moment où le courant entra en contact avec ses implants.
"Presque", dit le Docteur de façon optimiste, regardant les fluctuations de ses ondes cérébrales, puis B'Elanna. "Les ondes cérébrales sont vraiment plus faibles... Une de plus devrait suffire."
"Je suis d'accord", dit B'Elanna, réajustant prudemment l'instrument dans ses mains.
"Chargé à 40", l'informa le Docteur.
B'Elanna plaça l'instrument près des tempes de Seven une fois encore. Elle administra la décharge. La réaction fut instantanée. Le corps de Seven s'arqua sur le lit médical, semblant souffrir tandis que la décharge s'échappait dans ses implants.
"Oui !" déclara le Docteur avec exubérance. Il se tourna vers B'Elanna. "La seconde empreinte a complètement disparu. Ca marche."
"Parfait", dit B'Elanna reposant l'appareil sur le chariot. "Maintenant, nous devons sauver le patient." Elle prit rapidement les outils et commença à réparer les implants de Seven pendant que le Docteur baladait son tricordeur de la tête au pied du corps toujours inconscient de Seven.
"Je pense qu'elle va bien", dit le Docteur avec un sentiment de paix.
"C'est plus que je ne peux en dire pour ses implants", dit B'Elanna, regardant le Docteur toujours penché sur Seven, après avoir fini ses analyses. "Bien, elle ira bien. Cela nécessitera de nombreuses réparations, mais elle sera comme neuve dès que j'aurai fini."
Le Docteur sourit une fois encore, ses traits montrant son soulagement. Pour un hologramme, il pouvait paraître étonnamment humain, quelques fois. "Je suis sûr que oui."
 
*****
 
"Laissez-moi reprendre", dit Hayes calmement en se penchant en avant. "Monsieur Tuvok a créé un scénario virtuel dans lequel le Maquis se mutinait et prenait le contrôle du vaisseau ?"
"Oui", répondit Chakotay d'une voix monotone. Le compte-rendu était tout sauf une plaisanterie. Les questions devenaient plus pointues, plus personnelles. Chakotay était presque sûr que ce n'était pas la façon réglementaire de mener un compte-rendu. Bien qu'il doive admettre qu'il s'était écoulé du temps depuis son dernier compte-rendu.
"Et il croyait que c'était vraiment une possibilité, que le Maquis puisse prendre le contrôle du vaisseau ?"
"En ce temps-là, oui", soupira Chakotay
"Et l'avez-vous fait ?"
"Qu'est-ce cela a à voir avec le sujet ?" dit Chakotay légèrement irrité. "Cela ne s'est jamais passé. Que voulez-vous savoir ?"
"Pensez-vous que le Maquis aurait pu prendre le contrôle du vaisseau ?"
"Je ne vois pas..." commença Chakotay avant d'être coupé par la voix hargneuse de Hayes qui répéta la même question.
"Pensez vous..."
"Ca n'a rien à voir avec..." lâcha Chakotay, avant d'être interrompu une nouvelle fois.
"Monsieur Chakotay, vous êtes hors de propos", l'informa Hayes, sa voix grimpant d'un cran. Certains des Amiraux qui étaient assis négligemment dans leurs fauteuils sans prêter d'attention à ce spectacle ennuyeux s'étaient relevés rapidement, écoutant avec intérêt la discussion. "Maintenant, répondez à la question. Pensez-vous que le Maquis aurait pu prendre le contrôle du vaisseau à ce moment-là ?"
"C'était possible", admit Chakotay à contrecÏur. "Mais ça n'est jamais arrivé. Je ne vois pas en quoi c'est important."
"C'est moi qui pose les questions", dit Hayes durement, voyant que son autorité était à une nouvelle fois remise en cause. "Suis-je assez clair ? C'est le dernier avertissement que je vous donne, Monsieur Chakotay. Encore une réponse insolente de votre part, et vous serez traité plus sévèrement, je peux vous le promettre."
"Insolence ?" Chakotay agita la tête, l'air incrédule.
"Monsieur Chakotay." Il y avait une réelle menace dans sa voix, renforcée par son ton hargneux. Chakotay s'en rendit compte. "Maintenant, pourquoi pensez-vous que le Maquis aurait pris le contrôle du vaisseau, ou tout du moins tenté de le faire ?"
"Beaucoup d'entre eux n'étaient pas contents des circonstances qui nous avaient retenu dans le quadrant Delta et étaient véritablement insatisfaits d'avoir été forcés de réintégrer Starfleet. Pendant les premières semaines, j'ai entendu des rumeurs à propos de certains qui le considéraient, mais ce n'étaient que des paroles. Rien n'a jamais été tenté par qui que ce soit. Et je n'ai plus jamais entendu ce genre de rumeurs par la suite."
"Très intéressant", dit Hayes, faisant défiler les données sur sa tablette, avant de reporter son regard sur Chakotay. "Maintenant dites-moi, n'avez-vous jamais pensé prendre le contrôle de Voyager ?"
"Quoi ?" s'exclama Chakotay. "Non ! C'est ridicule."
"Et bien à moi, ça me semble très sensé", le poussa Hayes. "Vous étiez leur chef... Si quelqu'un avait pu organiser cela, c'était bien vous. Et vous le saviez."
"Oui, je le savais", dit Chakotay. "Mais je n'ai jamais voulu prendre le contrôle du Voyager, et je ne l'aurais jamais fait. Pour être franc, je me sens insulté que vous me posiez une question pareille."
"Pourquoi vous sentez-vous insulté ?"
"Pourquoi insistez-vous à me demander quel était mon état d'esprit uniquement sur ce sujet ?!" demanda Chakotay. Son ton était juste assez poli, mais il avait touché la corde sensible, et Hayes réagit immédiatement.
"Monsieur Chakotay, ce compte-rendu est terminé."
Les autres Amiraux se tournèrent vers Hayes, légèrement choqués.
Chakotay n'était pas sûr de savoir quoi dire. Poussant sa chaise, il se leva et se dirigea vers les gardes qui encadraient la porte.
Hayes se retourna vers lui et lui dit, "Votre audience débutera la semaine prochaine. Nous vous en donnerons la date exacte dès que nous en aurons la confirmation. "
"Audience ?" Chakotay paraissait horrifié à cette perspective.
"Oui", dit Hayes rapidement, affichant un visage de vainqueur. "Vous n'avez pas coopéré, nous transformons donc votre compte-rendu en audience."
"Monsieur, avec tout votre respect", commença Chakotay, "pourquoi suis-je convoqué à une audience ?"
"Pour crimes de guerre", dit Hayes en regardant Chakotay. "Je vous verrai face au comité de juges la semaine prochaine. Disposez."
"Mais, Monsieur..."
"Disposez", dit Hayes, sa voix s'amplifiant à nouveau, faisant écho dans la pièce, et ne laissant à Chakotay aucun doute quand à la fin de la conversation.
Silencieusement, il suivit les gardes à l'extérieur de la pièce, en file indienne.
 
*****
 
"Comme si elle était neuve", dit B'Elanna, refermant son tricordeur avec un claquement sec avant de le reposer sur le chariot. "S'il y a le moindre problème ou effet secondaire que je n'aurais pas compensé, vous savez où me trouver."
"Merci pour votre aide", dit le Docteur sincèrement.
"Je vous en prie", dit B'Elanna en partant, regardant Seven une dernière fois.
Prenant une seringue hypodermique, le Docteur la remplit puis s'approcha du lit médical, la pressant doucement contre le cou de Seven. L'instrument émit un psssch au moment même où Seven commençait à regarder autour d'elle.
"Do... Docteur ?" demanda-t-elle, se relevant légèrement sur le lit et jetant un Ïil autour d'elle, regardant l'infirmerie avec confusion.
"Comment vous sentez-vous ?" demanda le Docteur, accourant immédiatement à ses cotés et l'aidant à s'asseoir.
"Je me sens bien", dit Seven toujours confuse. "Ai-je eu un accident ? Pourquoi suis-je à l'infirmerie ?"
"Vous ne vous rappelez pas ?" C'était maintenant le Docteur qui paraissait confus. Il lui demanda rapidement, "quelle est la dernière chose dont vous vous souvenez ?"
"Je me souviens que vous m'avez donné un tranquillisant pour dormir... Vous étiez inquiet de ma fatigue excessive", dit Seven en se rappelant. "Et puis... Après ça, je ne me souviens de rien."
"Je ne me rappelle pas..." commença le Docteur, avant de s'interrompre. "Etes-vous en train de parler du moment où nous étions menacés par les Sernaix ?"
"Etions ?" dit Seven en levant un sourcil.
"Oui, nous avons laissé les Sernaix derrière nous... Nous sommes de retour, sur Terre", déclara le Docteur, lui annonçant les nouvelles aussi doucement que possible.
Le silence régna pendant un moment. "Je ne me souviens pas de cela", dit Seven, d'un ton étonnamment incertain. "Vous... Vous dites que nous sommes de retour dans le quadrant Alpha ?"
"Oui", lui confirma le Docteur. "Nous sommes de retour sur Terre... Les comptes-rendus ont commencé depuis un moment maintenant. Vous êtes tombée... malade... au milieu du vôtre."
"J'étais malade ?"
Le Docteur s'interrogea sur la façon de lui annoncer, mais se décida rapidement. Seven était de nature curieuse et ne s'arrêterait pas de fouiller avant de connaître toute la vérité. "Il y avait une seconde présence dans votre esprit... Une seconde signature neurologique."
"Je ne m'en souviens pas", dit Seven calmement.
Le Docteur resta silencieux un moment. Saisissant un appareil, il commença à le balader sur le côté de son visage avec précaution. Seven sentit la douleur diminuer jusqu'à disparaître.
"J'ai une théorie", lui dit-il doucement. "Je crois que cette présence dans votre esprit est en fait Ozymandia." Il regarda Seven pour voir sa réaction.
"Je vois", dit-elle lentement. "Je crois que c'est une supposition logique, Docteur."
Il y eut un silence pendant que le Docteur continuait tranquillement son travail.
"Nous y sommes", entonna joyeusement le Docteur en éloignant l'instrument de son visage avant de l'éteindre, faisant brusquement disparaître le rayon de lumière bleue. "Vous êtes comme neuve, si je puis dire."
"Merci pour vos efforts, Docteur", dit Seven. Je... J'apprécie votre attention."
"Je vous en prie", dit-il tout en commençant à ranger l'infirmerie. Des heures de recherches et les procédures et autres réparations compliquées avaient laissé la pièce en désordre. Les tablettes de données étaient éparpillées et les instruments de chirurgie s'entassaient sur le plateau du chariot où ils avaient été abandonnés après usage.
Après quelques secondes, il s'arrêta. "Seven, est ce que tout va bien ?"
Elle leva un sourcil. "Je crois que c'est vous le praticien, Docteur. Vous êtes donc plus capable que moi de répondre à cette question."
Il poussa un soupir holographique et resta près du lit médical, la regardant. "Physiquement, Seven, vous allez bien. Cependant... D'un autre coté, vous paraissez..." Il s'interrompit, cherchant le mot exact. "Distraite."
Seven garda le silence pendant un moment. Elle admirait, non pour la première fois, la surprenante exactitude des intuitions du Docteur. Son esprit mi-Borg naturellement logique avait immédiatement fait l'hypothèse que c'était simplement les mots qui collaient à son changement de comportement que les sous programmes du Docteur avaient remarqué. Cependant il était surprenant de voir la ressemblance avec le comportement humain.
"Je suis... perturbée", admit Seven, surprenant légèrement le Docteur. Il avait appris à connaître Seven dans le quadrant Delta et il savait d'expérience qu'elle n'était pas habituellement prête à reconnaître ce genre de faiblesse. Elle échouait même quelques fois à l'identifier comme telle.
"Comment ça ?" s'enquérit le Docteur, la forçant à développer.
"Je n'ai aucun souvenir des trois derniers mois de ma vie", dit Seven, son ton légèrement confus. "Beaucoup de choses se sont passées durant ces trois mois, et j'essaye par défi de m'y adapter."
"Cela fait beaucoup pour une adaptation", accorda le Docteur.
"Effectivement", dit Seven. Elle s'interrompit un instant avant de continuer. "Je trouve cela déconcertant... Je sens encore sa présence dans mon esprit. "
"C'est vrai ?" le Docteur sembla soudain inquiet. "Peut-être devrais-je..."
"Ce n'est pas nécessaire", l'informa Seven calmement. "Je sais que ça peut vous paraître difficile à comprendre, mais je contrôle la situation."
"Si vous en êtes sûre", dit le Docteur. "Seven, vous avez traversé beaucoup d'épreuves. Assurez-vous que vous avez le contrôle... Et s'il vous plaît, allez-y doucement pendant quelques jours. Reprenez des forces."
Seven le regarda un moment, prête à protester, puis pensa que c'était mieux ainsi. "J'obéirai", répondit-elle, se rallongeant sur le lit médical pendant que le Docteur retournait à sa tâche de remise en l'état l'infirmerie.
 
*****
 
"... Et maintenant, notre dernier sujet, les dernières nouvelles du destin de ceux qui servirent à bord du vaisseau Voyager durant ce voyage de 7 années à travers le quadrant Delta."
Le journaliste s'interrompit, prenant une grande inspiration et regardant brièvement la tablette de données qu'il tenait dans ses mains.
"Tout d'abord, nous avons été informés par l'Amirauté que les anciens membres du Maquis qui ont été intégrés à l'équipage du Voyager auront chacun de façon individuelle un procès dont la date sera déterminée bientôt. Ce procès sera basé sur les détails de leur service à bord du vaisseau et décidera de leur futur. Pour le moment, nous n'avons aucune information sur ce qui pourra advenir à la fin de ces jugements." Le journaliste marqua une nouvelle pause.
"Ensuite, les quelques anciens membres d'équipage de l'USS Equinox ayant servi sous le Capitaine Ransom avant leur transfert forcé sur le Voyager ont déjà tous été reconnus coupables de conduite indigne d'un officier et purgent actuellement une peine d'emprisonnement dans la colonie pénitentiaire de la Fédération en Nouvelle-Zélande. Nous n'avons pour l'instant aucune idée de la durée de leur peine, cependant nous pouvons spéculer qu'ils ne seront pas libérés de sitôt."
L'annonceur eut un petit sourire.
"Enfin, mais pas des moindres, le Capitaine du Voyager, Catherine Janeway, qui a également été retenue avec les autres membres de son équipage pour de longs comptes-rendus, a été relâchée, il y a quelques jours et est tient maintenant un poste de bureau dans les quartiers généraux de Starfleet. Aucune information n'a filtré sur le caractère définitif ou temporaire de cette affectation."
Il fit une dernière pause et sourit encore.
"C'est ainsi que se termine notre journal. Merci de nous avoir choisi. Je vous souhaite une bonne soirée."
 
---------------
Ecrit par: Bec & Rebel
version française: Delphine
Producteurs: Thinkey, Anne Rose et Coral
Remerciements aux différents correcteurs: Kate & Zeke (version originale), Laurent (version française).

..
Retour aux autres épisodes de la saison 8
    Episode précédent    Version texte    Version originale    Episode suivant

Star Trek and all its related marks are trademarks of Paramount Pictures. No Infringement Intended.